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Georges W. Bush : mensonges, guerres et paix

On sait aujourd’hui pourquoi Barack Obama, après la fin de son mandat, est resté très populaire et même toujours considéré par ses compatriotes comme un bon président, contrairement à son prédécesseur, Georges Walker Bush, dont l’histoire retiendra qu’il mit la planète en feu et en sang. Plusieurs livres parus ces dernières années nous éclairent sur les circonstances dans lesquelles il mena ses guerres.

Par Dr Mounir Hanablia *

La présidence de Georges Walker Bush a été marquée par un événement majeur, les attaques du 11 septembre 2001. Aujourd’hui, il est assez hasardeux de prétendre que ces événements aient entraîné les guerres ultérieures en Irak et en Afghanistan.

Les Etats-Unis étaient en effet en guerre contre l’Irak depuis 1991, époque de la Guerre du Golfe, et en 2001, ce pays était toujours soumis à un embargo économique sévère, dont la population civile faisait les frais, et avait perdu sa souveraineté après l’instauration par la coalition américano britannique d’une zone d’exclusion aérienne au-dessus du Kurdistan, et les tirs de missiles sol air irakiens dont la coalition a prétendu faire les frais, n’avaient fait qu’envenimer les choses.

Des guerres menées sur la base de mensonges

Dès son arrivée à la Maison- Blanche, le président Bush avait secrètement demandé à l’état major militaire la préparation d’un plan d’attaque contre l’Irak visant à abattre le régime de Saddam Hussein, avant même le début de la grande guerre contre le terrorisme.

Quant à la guerre contre Al-Qaïda en Afghanistan, des ambassades américaines, en particulier celle de Nairobi au Kenya, avaient été la cible d’attaques terroristes par cette organisation, dans les années 90, après le débarquement des troupes américaines en Arabie Saoudite, prélude à l’opération Tempête du Désert contre l’Irak. Et l’USS Cole avait essuyé en 2000 une attaque suicide au large d’Aden. L

es autorités américaines avaient donc d’autant moins de raisons d’être prises de court par une action d’Al-Qaïda, que la CIA deux mois auparavant avait tiré la sonnette d’alarme sur la préparation d’attentats, sans paraît-il être en mesure de fournir plus d’informations.

Les guerres contre l’Irak et l’Afghanistan étaient ainsi en réalité déjà situées dans la logique des choses, bien avant qu’elles eussent été décidées, et on peut supposer qu’elles eussent de toute manière été menées, quel qu’en fût le prétexte.

C’est sans doute à la même conclusion que le Japon était arrivé en 1941, en décidant d’ouvrir les hostilités contre l’Amérique. Mais si l’objectif du Japon a été militaire, la neutralisation de la flotte américaine du pacifique, celui d’Al-Qaïda a probablement obéi à une volonté d’intimidation, en démontrant que toute action menée contre elle déborderait fatalement sur le territoire américain.

Mais la guerre contre le terrorisme a été précédée par l’assassinat du commandant Massoud par des Tunisiens, et c’est encore un Tunisien qui allait être accusé de déclencher la guerre sunnites chiites en Irak en faisant exploser le mausolée de l’imam Al-Askari. Elle a quand même eu quelques conséquences en Amérique. Elle a essentiellement institutionnalisé le cadre sécuritaire permettant l’espionnage des citoyens américains et la justice secrète couvrant les violations des garanties constitutionnelles.

Si Georges Bush est devenu si impopulaire à la fin de son mandat, les raisons n’ont donc finalement pas manqué. Des mensonges sur l’existence des armes de destruction massive en Irak, à la volonté d’envoyer d’avantages de renforts dans ce pays malgré les pertes de plus en plus importantes subies par les troupes américaines confrontées à une véritable anarchie et prises dans un conflit interconfessionnel qu’elles ont attisés, tout cela a sapé l’autorité du président au point de ne pas convaincre Capitol Hill du bien-fondé de sa politique sur d’autres dossiers importants.

La gestion calamiteuse des secours après le passage dévastateur de l’ouragan Katrina sur la Louisiane a constitué le point de non-retour, même aux yeux des membres de son propre parti, le Parti Républicain.

Mépris du droit et relations tumultueuses avec la justice

Malgré cela, et d’une manière surprenante, c’est en faisant abstraction de ses convictions libérales qu’il s’est résigné à convaincre le Sénat et la Chambre des Représentants de la nécessité d’injecter près de 700 milliards de dollars pour soutenir le secteur bancaire sinistré après l’explosion de la bulle immobilière et la crise des subprimes, et de secourir l’industrie automobile moyennant une restructuration. Et il s’efforça tout autant durant ses deux mandats de convaincre ses partenaires tout aussi bien que ses adversaires, du bien -fondé de sa politique, afin d’obtenir les votes nécessaires institutionnalisant ses choix.

Les relations du président américain avec la justice furent cependant, d’une certaine manière, assez tumultueuses. Bush et le vice-président Dick Cheney étaient convaincus de la nécessité de recourir à des interrogatoires illégaux usant de la torture pour obtenir les renseignements qu’ils estimaient nécessaires à la lutte contre le terrorisme.

La base militaire américaine de Guantanamo située à Cuba fut choisie pour abriter le camp spécial où seraient détenus les prisonniers d’Al-Qaïda sans possibilité de bénéficier des lois américaines. Et pour finir après le scandale de la prison d’Abou Gharib en Irak et les résolutions du Capitole contre la torture et les violations des droits des détenus, ils furent confiés à des sous-traitants, roumains, polonais, ou égyptiens.

Les raisons à tout cela n’ont pas manqué d’être évoquées. Si la doctrine de la guerre préventive servit à justifier celle, sale, menée contre l’Irak sur la base d’un mensonge, on ignore pourquoi elle ne fut pas appliquée contre la Corée du Nord, autrement plus menaçante, ou encore contre le Pakistan, dont on avait prétendu qu’un savant atomiste avait fourni les informations nécessaires pour la fabrication d’une «bombette» nucléaire. La guerre contre le Pakistan se limiterait aux «frappes» de drones dans la zone tribale limitrophe de l’Afghanistan, occasionnant les dégâts collatéraux nécessaires à la propagande des Talibans, à leur renforcement, et plus tard leur victoire finale.

Quant à la nécessité de l’instauration de la démocratie et de la Liberté dans le monde arabe et musulman, au nom de la sécurité des Etats-Unis, ce ne fut qu’un argument de circonstance que le président récupéra après coup chez l’ancien dissident soviétique Natan Sharansky ou le professeur de Yale John Gaddis, et il fit néanmoins florès ultérieurement, durant le printemps islamiste.

On ignorera toujours pourquoi Barack Obama, en suivant une politique identique, acquit la popularité qui, après la fin de son mandat, le fait toujours considérer par ses compatriotes, contrairement à son prédécesseur, comme un bon président. Que Bush ait lui-même pris les décisions, ou qu’il ait obéi à son vice, n’y changera finalement rien.

* Médecin de pratique libre.

*  »Days of Fire: Bush and Cheney in the White House » , par Peter Baker, Hardcover Edition, 22 octobre 2013, 1193 pages.

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