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Soudan: un coup d’État emporte Omar el-Béchir

L’annonce d’un «Conseil militaire de transition» a aussitôt été contestée par les manifestants antirégime.

Une chose qui ne change pas au Soudan est l’annonce des grands changements. Quand, comme jeudi, depuis l’aube, la radio d’État et les télévisions passent en boucle des airs militaires et des chants patriotiques surannés, les Soudanais savent que les notes égrènent en fait des dernières minutes d’un régime. La force de l’habitude d’un peuple qui vit son quatrième coup depuis 1956 et l’indépendance. Même si l’état-major n’avait pas dit, dans un communiqué être sur le point de faire «une déclaration importante», chacun a compris. Le président Omar el-Béchir ne fêtera jamais son 30e anniversaire au pouvoir. À quelques jours du 30 juin qui devait le voir célébrer cette grande date, le chef de l’État a été démis, placé sous bonne garde, sous surveillance, dans sa résidence, à un gros jet de pierre seulement de l’immense foule qui, massée sur une esplanade, exige depuis décembre sa chute.

« Cela a tout d’une reprise en main. Le régime tente de se substituer à lui-même »

Un observateur

L’immense incertitude qui s’ouvre devant le Soudan n’a pas empêché le peuple vainqueur de vite célébrer son triomphe. Bruyamment. Des groupes chantent, dansent, agitent des drapeaux. Il faut profiter de l’instant. La nuit précédente, l’armée s’est massivement déployée sur les ponts et les avenues. Pour protéger une fois encore la révolte ou, cette fois, tenter de la mater? La Sudanese Professionals Association (SPA), l’organisation qui chapeaute discrètement les protestations, se réjouit et appelle à rester vigilant. «La révolution de décembre est vainqueur grâce à vous.» La SPA exige une transition civile. On se méfie. À raison.

En début d’après-midi, les décisions, objets d’intenses tractations depuis des jours, tombent. Le ministre de la Défense, Awad Ahmed Ibn Auf, annonce l’attendu - l’arrestation du président - et le redouté: la mise en place d’un «Conseil militaire de transition» pour deux ans, dont il va prendre la tête. Dans la foulée, un couvre-feu est ordonné ainsi qu’un état d’urgence pour trois mois qui remplace… l’état d’urgence de six mois décrété en février. «Cela a tout d’une reprise en main. Le régime tente de se substituer à lui-même», déplore un observateur. La SPA ne dit pas autre chose et très vite demande de continuer la lutte, rejetant «ce coup d’État militaire» mené «avec les mêmes visages». Le bras de fer ne s’est pas terminé avec la chute d’Omar el-Béchir. D’abord prudente, la communauté internationale a progressivement réagi. L’Égypte s’est dite ainsi «confiante» dans la capacité des Soudanais à surmonter la crise. Les États-Unis et l’Europe ont demandé, jeudi, une réunion du Conseil de sécurité, Washington exhortant l’armée à intégrer les civils dans un gouvernement d’ouverture. Le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, a pour sa part réclamé que la transition respecte les «aspirations démocratiques» des Soudanais. De son côté, l’Union européenne a demandé à l’armée le transfert «rapide» du pouvoir à un gouvernement de transition.

Le ministre de la Défense, en effet, n’a rien d’un opposant. Promu en février vice-président, il passait même pour un pilier du système ; un dur. En cette période trouble, les fidélités sont toutefois incertaines. D’autres caciques semblent, eux, être tombés en disgrâces dans cette lutte pour le pouvoir. Salah Gosh, le puissant patron du National Intelligence and Security Service (NISS) aurait été arrêté. Pendant que des portes de prison se ferment, d’autres se sont ouvertes. Les nouveaux hommes forts ont ordonné la libération des prisonniers politiques, le plus souvent des civils arrêtés par centaines au cours des derniers mois. Une petite concession avant la reprise en main. Un temps hésitants face à ce coup d’État mal caché, les manifestants se sont rendus par milliers devant le QG de l’armée jeudi soir, malgré le début du couvre-feu.

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3 commentaires
  • Oskar Lafontaine

    le

    Un coup d'Etat ? Ce ne serait pas plutôt le diable qui devrait emporter Omar-el-Béchir ?

  • Plokamaki17

    le

    Le nid de gauchistes qu est la Cour Pénale Internationale va t elle demander qu il lui soit livre , il me semble qu il fait l objet d un mandat d arrêt international, deja il y avait quelques années il etait parvenu à repartir libre d Afrique du Sud, N est pas Batisti qui veut.

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