Avec Fouad Mebazaa, c'est un homme âgé (78 ans) qui se retrouve à la tête de la Tunisie. Deuxième personnage de l'Etat en tant que président de la Chambre des députés depuis 1997, M. Mebazaa doit à cette fonction de se retrouver aujourd'hui chef de l'Etat. Sans doute n'avait-il jamais rêvé d'une telle promotion.
L'homme a collectionné les portefeuilles ministériels et les postes à responsabilité à l'époque d'Habib Bourguiba, le "père de l'indépendance", puis durant les années Ben Ali. Il a, enfin, servi fidèlement le président déchu pendant vingt-trois ans. "A aucun moment, il ne s'est distingué par son courage", affirme, sous le couvert de l'anonymat, un ancien ministre qui l'a côtoyé durant l'ère Bourguiba.
Dans un "mémo" diplomatique américain daté de mai 2009, obtenu par WikiLeaks et révélé par Le Monde, même son de cloche. Le nouveau président est présenté comme un septuagénaire sans ambition, "loyal vis-à-vis de Ben Ali et qui ne représente pas un danger pour lui".
Le président Mebazaa est qualifié d'"épicurien" par son ancien collègue du gouvernement. "Mebazaa aime la bonne chère, se balader boulevard Saint-Germain, à Paris, ou venir à Cannes, au moment du festival dont il est un habitué", raconte-t-il.
Se pencher sur la carrière de Fouad Mebazaa, c'est découvrir un homme issu de la bourgeoisie, au parcours linéaire, maire de Tunis (1969-1973) puis ministre de la jeunesse et des sports sous Bourguiba (en 1973) - son premier poste ministériel -, avant de se retrouver à la santé publique puis à l'information.
Le président Bourguiba écarté par Zine El-Abidine Ben Ali en novembre 1987, M. Mebazaa reste au gouvernement où il se voit confier, pour la seconde fois, le portefeuille de la jeunesse et des sports avant de devenir le maire de Carthage (1995-1998), la banlieue chic de Tunis. Apparatchik du régime, il était aussi membre du bureau politique du Rassemblement constitutionnel démocratique, le parti du président.
Deux brèves disgrâces dans ce parcours lisse. Ministre de la jeunesse et des sports, M. Mebazaa est écarté du gouvernement par Ben Ali à la suite d'une petite phrase de son épouse, Lilia Mebazaa, prononcée au cours d'une réception à la présidence et qui avait déplu en haut lieu.
Une lettre d'excuses
M. Mebazaa a subi les foudres du président une seconde fois lorsque, maire de Carthage et président de la Chambre des députés, il a voulu faire du zèle en affichant dans les rues de la ville un portrait géant de Ben Ali qui, pour une raison inconnue, déplut à ce dernier.
Limogé sur-le-champ comme maire de Carthage, M. Mebazaa n'allait être écarté de son poste de président de la Chambre des députés que quelques jours. A la suite d'une lettre - probablement d'excuses - transmise au chef de l'Etat, sa voiture de fonction, ses gardes du corps lui furent rendus avec son titre.
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