Pierre Robert BADUEL
MAURITANIE 1945-1990 OU L'ÉTAT FACE A LA NATION
«L'objet de la science sociale est une réalité qui englobe toutes les luttes, individuelles et collectives, visant à conserver ou à transformer la réalité, et en particulier celles qui ont pour enjeu l'imposition de la définition légitime de la réalité et dont l'efficacité proprement symbolique peut contribuer à la conservation ou à la subversion de l'ordre établi, c'est-à-dire de la réalité*.
P. Bourdieu (1980 a, 244)
Les émeutes anti-maures et anti-sénégalaises qui ont déferlé respectivement sur le Sénégal et sur la Mauritanie en avril 1989 et devaient conduire les deux pays à la rupture de leurs relations diplomatiques en août 1989, si elles ont attiré sur la région l'attention des media étrangers, ont montré en même temps la méconnaissance de l'opinion occidentale à l'égard de la Mauritanie.
Sauf l'hypothèse de choix partisan dans certains cas, on peut d'autant mieux «comprendre» cette opinion publique internationale que les travaux des spécialistes du monde musulman — à supposer qu'ils soient lus, hypothèse toute gratuite — présentent eux-mêmes parfois pour le moins des ambiguïtés qui ne peuvent que troubler les lecteurs rapides et conduire à des jugements spécieux. Ainsi par exemple de la question de l'africanité et/ou de l'arabité de la Mauritanie qui est le cœur du débat actuel.
Dans le remarquable et particulièrement utile ouvrage présentant Les grandes dates de l'Islam (R. Mantran éd., 1990), tandis que le Maroc, la Tunisie, la Libye
RE.M.MM. 54, 1989/4