Tunisie : évitons le débat toxique sur l’identité !

Nous connaîtrons aujourd’hui, jeudi 30 juin 2022, le projet de la nouvelle constitution proposé par le président de la république Kaïs Saïed, qui fera l’objet d’un référendum, le 25 juillet prochain. Espérons que le nouveau texte ne nous plongera pas à nouveau dans les polémiques toxiques, stériles et sans fin sur l’identité d’un peuple qui a intérêt à chasser les démons du passé et à regarder vers l’avenir.

Par Nebil Maghraoui *  

Le terme «nationalité» vient étymologiquement, il est vrai, de «nation» et la nation est l’ensemble des êtres humains de même origine, ayant la même histoire, la même culture, la même langue, les mêmes traditions et vivant sur le même territoire constituant ainsi une entité politique distincte.

La «oumma», un terme qui prête à confusion 

Nation en arabe se traduit «oumma» (الأمة) et est associée et assimilée sur le plan conceptuel à la «oumma arabia» ou nation arabe et envoie à une tendance idéologique et politique, le nationalisme arabe ou panarabisme. Le terme renvoie aussi à la «oumma islamia» (الأمة الإسلامية), la communauté des croyants à laquelle croient les panislamistes comme les Frères Musulmans et leurs excroissances) et le terme «oumma» peut être ainsi confondu et est souvent confondu dans l’esprit et dans l’imaginaire de certains peuples de langue arabe et/ou de religion islamique, comme les Tunisiens.

Voilà pourquoi l’insertion sournoise et cynique du terme الأمة الإسلامية peut prêter à équivoque et alimenter de regrettables ambiguïtés. Par conséquent, le terme peut être utilisé sciemment par des esprits pernicieux qui aiment surfer sur ces ambiguïtés.

Tunisiens d’abord et avant tout!

En Tunisie, nous sommes, à l’origine, un peuple africain de souche berbère enrichi par l’apport génétique et culturel de plusieurs autres peuples dont les Arabes venus conquérir notre territoire, nous dominer et nous convertir à l’islam.

La Tunisie, qui a subi plusieurs conquêtes et vagues de peuplement est par vocation historique et civilisationnelle un pays multiculturel et multiconfessionnel (même si certaines croyances y sont minoritaires) et la démocratie exige le respect du droit des minorités. Voilà pourquoi la vigilance s’impose pour éviter le contentieux idéologique souvent suscité par les islamistes qui sont toujours à l’affût et qui, à chaque occasion politique majeur, cherchent à imposer leurs vues étriquées, dogmatiques et exclusives.

En attendant une Tunisie laïque

La Tunisie est, depuis la proclamation de la république en 1957, un pays à caractère civil, en attendant que l’ensemble des partisans d’«echaab yourid» ou «volonté populaire» (slogan cher au président de la république Kaïs Saïed) comprenne que la laïcité n’est ni mécréance ni apostasie, mais une convention qui facilite la vie en commun puisqu’elle repose sur deux principes : l’obligation de l’État de ne pas intervenir dans les convictions de chacun et l’égalité de tous devant la loi, quelle que soit leur religion.

Si je suis favorable à l’instauration de la laïcité en Tunisie c’est parce que je voudrais que mon pays géographiquement africain et méditerranéen et historiquement phénicien, punique, romain, byzantin, arabe, andalou, ottoman, espagnol, français… soit un Etat civil, moderne, progressiste, social où règnent l’ordre républicain et l’égalité entre citoyens quels que soient leurs genre, couleur, race ou religion. Je veux une Tunisie du respect, de la tolérance, de la fraternité et de la paix perpétuelle.

* Chef d’entreprise.

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