Mokhtar Ladjimi, Président du Master international film festival à Hammamet, à La Presse : «On l’a fait !»

«On l’a fait !», s’est exprimé Mokhtar Ladjimi, lors de la clôture du Miff qui s’est tenu à Hammamet. Un défi que le cinéaste a lancé et sur lequel il a travaillé pendant des années. Avec le recul et loin des feux des projecteurs, il nous a accordé cet entretien.

Commençons par le palmarès….

En réfléchissant au Miff, au tout début, j’ai voulu faire un palmarès digne d’un festival catégorie A , genre Toronto, Venise ou Cannes . Il s’agit de lancer un festival international dans un endroit exceptionnel qu’est Hammamet et qui réunit l’aspect culturel et touristique. Ainsi la qualité du palmarès était pour moi très importante dans toutes les catégories . Il y avait même le Lion d’or à Venise qui a figuré dans la catégorie Panorama.

Vous reliez le succès de cette première édition à son palmarès ?

Oui, parce que le choix était judicieux ! J’ai travaillé pendant neuf mois pour effectuer ce choix en faisant le tour des festivals. Le jury a eu du mal à départager ces films .

Une première édition, vous avez cumulé les fonctions…

En effet, pour cette première édition, j’étais président-fondateur, directeur général et directeur artistique et j’ai choisi tous les films en présélection. En écrivant les statuts de ce festival «Best of», j’ai placé la barre très haut. Rappelons que le festival est basé sur des films primés ou sélectionnés dans des festivals importants. C’était une bataille pour avoir ces films et vu le budget réduit dont je disposais, j’ai négocié très dur pour les avoir… Ensuite, j’ai nommé une commission de gens sérieux pour effectuer la sélection finale.

De toutes les façons ça coûte moins cher que des films en exclusivité…

En effet ! Et c’est pour cela que j’ai opté pour la formule d’un festival «Best of». D’autant plus et comme il s’agit de la première édition d’un festival qui vient de naître, les distributeurs ne vont pas non plus s’aventurer à donner leurs films. C’est aussi une question de relationnel et de confiance. Pour la première fois, le ministère du Tourisme s’associe à un festival de cinéma et il a fallu aussi convaincre les privés qui se sont associés à moi. Le groupe La Paix Médina Yasmine Hammamet, que je remercie, a cru en ce projet. Mes remerciements aussi à tous les membres de l’équipe de la Médina qui avaient d’autres tâches et qui ont soutenu ce festival.

Il y a d’autres festivals destinés au tourisme et à la culture, mais le ministère du Tourisme ne s’est pas engagé de la même façon qu’avec le Miff…

C’est une question «d’ossature, je dirais»… Ce qui constitue le cœur palpitant d’un festival c’est la qualité des films et son concept. Courte est la vie d’un festival dont la sélection des films est moyenne, à mon sens. Dès le départ, j’ai voulu bâtir un grand festival basé sur la qualité des films. Sur un autre plan, j’ai choisi un jury cinéphile, intègre et qui n’appartient à aucun clan.

Il y a tout de même le risque que, dans l’avenir, le festival devienne uniquement touristique…

Le festival a placé la barre très haut, notamment avec la sélection de ses films et il n’est pas question de reculer ne serait-ce que d’une once sur son concept. A partir du deuxième jour du festival, le public a déjà assimilé que c’est un concept culturel et touristique à la fois, mais qui a du calibre… Le tout doit être dans un esprit de tolérance et de dialogue entre les cultures. C’est aussi un regard du Sud vers le Nord et vice versa. Je n’ai pris parti pour aucun type de film.

Où placerez-vous le Miff dans le paysage des festivals tunisiens ?

Avec le Miff, j’ai voulu extraire les festivals de leurs ghettos. Nous avons besoin de festivals régionaux et qui ont une entité particulière. Hammamet mérite amplement un festival ouvert sur toutes les cultures du monde.

Le Miff est un festival à gros budget ?

J’ai fait ce festival avec peu de moyens. Les grands festivals ont un budget qui gravite autour de 10 ou de 20 millions de dollars. Nous, on l’a fait à moins d’un million de dollars grâce aux efforts du groupe La Paix, des ministères du Tourisme et des Affaires culturelles. Du reste, même les sponsors, à part la Biat et Tunisair, étaient frileux pour une première édition, c’est pour cela qu’ils ne nous ont pas accompagnés.

Que peut apporter ce festival pour le cinéma tunisien ?

D’abord c’est un festival qui apporte beaucoup au public tunisien pour qu’il reprenne goût au cinéma de qualité. Dans les années qui viennent, on espère fidéliser un public à ce concept. C’est un festival pour le public, pour les gens du métier, pour les jeunes et pour les écoles de cinéma.

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