| 01.03.11 | 16h39 Mis à jour le 01.03.11 | 16h40
Pour qui a vécu de l'intérieur le procès Clearstream, rien ne saurait reconstituer l'intensité dramatique de ces audiences qui ont transformé pendant trois semaines la première chambre du palais de justice de Paris en coeur battant de la vie politique française. Le temps de la justice, pour une fois, ne se conjuguait pas au passé. Un président de la République en exercice, partie civile, y écrivait une page de son quinquennat. Un ancien premier ministre, prévenu, jouait là une part de son avenir politique. Chacun sentait que cette plongée dans les arrière-cuisines du pouvoir constituait peut-être la première étape de la prochaine campagne présidentielle. A tout cela, l'audience offrait une exceptionnelle caisse de résonance.
De ce spectacle, micros et caméras étaient exclus. Dehors, c'était un autre procès qui se jouait. A chaque suspension d'audience, dans un incessant va-et-vient de robes noires, on refaisait le match. Mais il y manquait ce qui donne à un procès son caractère unique : la confrontation publique et permanente, dans cet espace minuscule du prétoire, entre ceux qui jugent, ceux qui accusent et ceux qui sont accusés.
C'est la limite du film Le Bal des menteurs. Il lui faut raconter de l'extérieur ce qui se joue à l'intérieur, de l'autre côté de cette double porte à hublot sur laquelle vient buter l'oeil curieux de la caméra. La qualité exceptionnelle des personnages de ce procès jouant leur propre rôle dans le film constitue paradoxalement son autre limite. Le spectaculaire mur de caméras, d'objectifs et de micros qui attend les prévenus ou leurs avocats dans la salle des pas perdus du Palais de justice ne les impressionne pas. Bien au contraire. Ils en maîtrisent les codes et en connaissent l'utilité. Dominique de Villepin mieux que tous les autres. Ceux du dedans voyaient ses traits fatigués, mesuraient sur la crispation de son visage l'épreuve que représentait pour lui cette comparution devant le tribunal. La sonnerie retentissait et c'était un autre homme, au regard assuré, un large sourire accroché aux lèvres, qui s'offrait aux images de télévision.
La même remarque vaut pour les entretiens avec les prévenus ou avec leurs avocats qui rythment Le Bal des menteurs. Ces dialogues filmés en cadre serré sur fond noir ne les mettent pas en difficulté. Me Olivier Metzner, l'un des quatre défenseurs de Dominique de Villepin, et son adversaire, Me Thierry Herzog, l'avocat de Nicolas Sarkozy, s'y révèlent de redoutables acteurs. Jean-Louis Gergorin et Imad Lahoud y apparaissent beaucoup plus détendus, heureux de saisir cette deuxième chance de dire leur vérité sur cette affaire. Ni l'un ni l'autre ne semblent jamais perdre de vue que la sortie du Bal des menteurs ne devancera que de quelques mois le procès en appel de l'affaire Clearstream.
Pascale Robert-Diard Article paru dans l'édition du 02.03.11
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