LEMONDE.FR | 11.03.11 | 21h05 Mis à jour le 11.03.11 | 21h09
C'est le séisme le plus fort jamais enregistré au Japon. Vendredi 11 mars, un tremblement de terre de magnitude 8,9, suivi de nombreuses et importantes répliques, a frappé le nord-est du pays, déclenchant un tsunami, avec des vagues atteignant dix mètres, et faisant des centaines de morts et de nombreux disparus. Jérôme Vergne, sismologue à l'Institut de physique du globe de Strasbourg, décrypte ce phénomène.
Quelle est l'origine de ce séisme ?
Le Japon subit de nombreux et forts séismes. Ce pays se situe en effet à la limite de deux plaques tectoniques. A cet endroit, la plaque Pacifique glisse vers l'ouest et plonge sous la plaque nord-américaine, qui englobe une partie de l'Eurasie, à une vitesse de presque 9 centimètres par an. Cette subduction ne s'effectue pas de manière continue mais saccadée ; chaque saccade se traduit par un séisme. Et comme la vitesse d'évolution des failles est importante, les séismes destructeurs ont lieu, à un endroit donné de cette région, fréquemment, tous les cent ans environ.
Au contraire, en France par exemple, les plaques n'évoluent que de quelques millimètres par an. Le retour des grands séismes est alors de l'ordre de 10 000 ans. Mais nous n'aurons sans doute jamais de séisme d'une magnitude similaire à celle de Sendai dans la mesure où la France, notamment le sud-est, est située sur une zone de collusion entre deux continents, alors que les forts séismes se produisent davantage dans des zones de subduction océaniques, comme celle du Japon.
En quoi ce tremblement de terre est-il exceptionnel ?
Ce séisme est le plus fort jamais enregistré au Japon et l'un des dix plus forts jamais survenus dans le monde. Il est tout d'abord très important en raison de sa magnitude, de 8,9 sur l'échelle de Richter, ce qui implique une énergie phénoménale relâchée en quelques minutes, bien plus importante que n'importe quel essai nucléaire. Par ailleurs, le foyer est assez proche de la surface, autour d'une vingtaine de kilomètres. Le séisme a donc déplacé d'importantes masses d'eau, provoquant un tsunami. Enfin, il a eu lieu en mer mais assez près des côtes, entre 150 et 200 km.
Par contre, il est caractérisé par une vitesse de rupture plutôt rapide, qui ne devrait donc pas provoquer un tsunami de très grande ampleur. Les ruptures lentes, au contraire, s'avèrent les plus dangereuses. Le séisme de Sendai est très fort mais classique du point de vue de son mécanisme.
Pouvait-on le prévoir ?
Nous ne disposons d'aucune méthode de prévision certaine et à court terme de l'occurrence d'un séisme. On peut juste indiquer les zones à risques. La région du nord-est du Japon faisait partie des zones à forte probabilité car elle n'avait pas connu de séisme majeur depuis près de cent ans.
Par ailleurs, depuis une semaine, une série de gros tremblements de terre s'y sont déroulés : le 9 mars par exemple, une secousse d'une magnitude de 7,2 a eu lieu à 40 km environ, suivie, le même jour, de trois autres événements d'une magnitude supérieure à 6. Les sismologues japonais étaient intrigués. Mais ce genre d'événements s'observe très fréquemment au Japon, sans qu'ils ne soient suivis d'un séisme majeur.
Le Japon était-il suffisamment préparé pour l'affronter ?
Le Japon est le pays le mieux préparé au monde. Depuis des années, et notamment depuis le séisme de Kobe de 1995, qui a fait plus de 5 000 morts, tous les équipements répondent à des normes para-sismiques. De nombreux systèmes sont prévus pour s'arrêter automatiquement, comme les centrales nucléaires, les conduites de gaz ou les trains automatiques, et la population connaît les gestes à accomplir grâce à des entraînements réguliers. Tout est donc fait pour réduire les dégâts induits par les séismes.
Le Japon ne pouvait pas faire plus. Les autorités ne peuvent pas évacuer les populations à chaque risque de tremblement de terre important : ceux de magnitude supérieure à 6 surviennent plusieurs fois par an, presque chaque mois.
Pendant combien de temps les répliques peuvent-elles survenir ?
Cela dépend de l'étendue de la fracture. On l'évalue pour l'instant à 500 km de longueur et une trentaine de kilomètres de largeur. Lorsque nous l'aurons davantage étudiée, elle nous donnera une idée plus précise de l'ampleur des répliques. Elles devraient durer plusieurs semaines, même si leur fréquence et leur magnitude vont décroître.
Mais nous ne sommes pas à l'abri d'un événement plus important, le "big one", que les sismologues redoutent dans une zone plus au sud, proche de Tokyo. Ce segment, à la limite des plaques tectoniques, n'a pas connu de tremblement de terre important depuis 1940. Le segment de faille qui a rompu à Sendai a peut-être avancé l'occurrence d'un séisme encore plus fort plus au sud.
Propos recueillis par Audrey Garric
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