Christian Gury (Centrale Paris): « Le marché s’est brusquement amélioré en mai 2010″

Chaque mois, le blog "Emploi et Entreprise" rencontre un responsable de service emploi-carrière d'une école ou d'une université.

Comment est organisée l'aide à la recherche d'emplois pour les diplômés et les anciens de l'Ecole centrale de Paris ?

Christian Gury: L'Ecole suit les étudiants jusqu'à l'obtention de leur diplôme, y compris en les aidant à rechercher un stage.

Les élèves de troisième année organisent eux-mêmes le forum annuel de recrutement au sein de l'Ecole. Mais dès qu'un Centralien est diplômé et jusqu'à sa retraite, c'est l'association des anciens élèves qui leur apporte soutien, conseil et aide à la recherche d'emploi ou à la gestion de leur carrière.

Diplômé de la promotion 1978, je suis depuis 2007 "responsable carrières" à l'Association des Centraliens, avec l'aide d'une assistante et de bénévoles de l'Association. Je conseille chaque année de 300 à 400 anciens, en entretien individuel ou par téléphone, et j'assure une permanence à l'Ecole.

Comment a évolué votre activité pendant ces trois années marquées par la crise ?

Jusqu'en septembre 2008, je ne recevais quasiment que des Centraliens en quête de mobilité, cherchant à évoluer dans leur carrière.

Le changement a été complet à partir de novembre 2008, et jusqu'à avril 2010. Le nombre de demandeurs d'emploi a bondi de 60% jusqu'en septembre 2009 - il s'agit cependant d'effectifs très réduits, je suis aujourd'hui la situation de 250 personnes sur... 14 000 anciens élèves -, avant de se stabiliser par la suite. Ce nombre n'a commencé à régresser qu'en avril 2010, d'environ 15%.

Vous n'avez donc toujours pas retrouvé la situation antérieure à la crise ?

Certes, mais la tendance s'est brusquement inversée à cette date: toutes les semaines depuis avril, j'entends des personnes qui cherchaient un emploi depuis fort longtemps me dire qu'ils ont enfin retrouvé un bon poste. Et je reçois à nouveau des anciens en quête de conseils pour évoluer. Cela dit, je ne peux pas savoir si cette tendance va se poursuivre en septembre, il est trop tôt pour le dire.

Est-ce que ce sont les jeunes cadres du secteur financier qui ont été le plus touchés par la crise ?

Pas vraiment, car le nombre de Centraliens travaillant dans l'activité financière est assez faible.

J'ai bien vu débarqué quelques jeunes revenus de la City de Londres, mais le secteur automobile, par exemple, a connu une crise beaucoup plus grave. En fait, ceux qui ont eu le plus de difficulté ont été, paradoxalement, des ingénieurs de haut niveau de 45 ans, occupant des postes de direction générale et de direction d'unités, qui perdaient leurs postes à l'occasion de restructurations, de fusions, de rachats d'entreprises provoquant la suppression d'unités, ou de doublons fonctionnels.

Ce type d'événements étaient fréquents avant la crise, mais les cadres supérieurs retrouvaient généralement un poste dans la nouvelle organisation. La crise a changé cela : eux aussi ont commencé à être licenciés. Et retrouver un emploi à ce niveau de salaire et de responsabilité était extrêmement difficile au moment le plus fort de la crise.

Les jeunes diplômés ont-ils été épargnés ?

Ceux qui sont sortis en décembre 2008 (les diplômes de l'Ecole centrale de Paris sont délivrés en décembre) ont été cueillis à froid par la crise. Ils avaient commencé tranquillement leurs stages, mais en janvier, les entreprises leur ont annoncé que ceux-ci, contrairement aux habitudes, ne seraient pas suivis d'embauche.

Il leur a donc fallu changer très vite leur fusil d'épaule, mais tous ont trouvé un emploi: simplement, quand ils recevaient trois propositions en 2008, il n'y en avait plus qu'une en 2009. Les diplômés de décembre 2009, eux, n'ont pas été surpris et se sont organisés en conséquence pour décrocher des emplois sans trop de difficultés : ceux des filières financières, par exemple, se sont dirigés vers des postes de direction financière d'entreprises, etc.

Qu'avez-vous pu faire pour aider les Centraliens à affonter ces situations inédites ?

Traditionnellement, notre tâche principale était de collecter les offres et de les redistribuer aux anciens en recherche d'emploi et de mobilité. Mais le nombre d'offres a diminué de 30% à 40% pendant la période la plus difficile. Nous avons alors développé un service qui existait déjà, mais que nous avons professionnalisé: les anciens élèves peuvent remplir une sorte de mini-CV, ou "profil", relatant en huit lignes leurs compétences, mais sous le sceau de l'anonymat, que nous diffusons ensuite auprès des entreprises et des cabinets de recrutement.

L'anonymat, indispensable pour les personnes en poste, n'est levé que si un recruteur manifeste son intérêt pour un profil donné. Les profils sont remis à jour toutes les six semaines. Cet outil a aidé un grand nombre de Centraliens à surmonter leurs difficultés. Par ailleurs, alors que nous ne faisions jusqu'ici que des ateliers de techniques de recherche d'emploi, nous avons organisé à l'attention des anciens en poste des conférences sur la prévention des risques de carrière, afin de les préparer à affronter ce type de situation.

Enfin, dans le même but, j'ai rédigé un petit livre intitulé Cinq clés pour rebondir et piloter sa carrière (éditions A2C Medias), publié en octobre 2009 !

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