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G20 : les multinationales dans l'arène politique

LE MONDE ECONOMIE | 14.03.11 | 18h01  •  Mis à jour le 14.03.11 | 18h19

 

La "une" du "Monde Economie", daté 15 mars 2011.

La "une" du "Monde Economie", daté 15 mars 2011.DR

Sous la présidence française, l'ambition du G20 est de poursuivre le rétablissement de l'ordre économique mondial. En renforçant la régulation financière, en développant la dimension sociale de la mondialisation et en luttant contre la corruption. Ces enjeux concernent au premier chef les multinationales. Et bien qu'elles n'apparaissent pas toujours sur le devant de la scène politique, elles seront parties prenantes des négociations à venir.

L'influence des entreprises sur les autorités publiques n'est pas nouvelle mais, depuis un quart de siècle, l'avènement des multinationales a changé la donne sur la scène politique mondiale. Ces dernières sont devenues des acteurs politiques transnationaux, capables de dialoguer avec de multiples interlocuteurs publics au-delà de leur pays d'origine. Ainsi, Exxon Mobil ou Toyota - dont les revenus annuels sont comparables, respectivement, au produit intérieur brut (PIB) du Portugal et d'Israël - sont des groupes susceptibles d'influencer les négociations à venir.

En 2010, les dix plus grandes multinationales ont investi plus de 110 millions de dollars (80 millions d'euros) dans le lobbying rien qu'aux Etats-Unis, où la loi les oblige à déclarer ces dépenses. Alors qu'elles gèrent directement certaines de ces activités, elles recourent aussi de plus en plus au service de firmes spécialisées chargées de représenter leurs intérêts auprès des autorités publiques.

Ces stratégies ne sont pas les seules à être utilisées. Steven Barley (professeur à l'université Stanford) explique, dans un article intitulé "Building an Institutional Field to Corral a Government" paru en 2010 dans le journal Organization Studies, que les entreprises s'appuient aussi de plus en plus pour influencer le débat public sur la création et le financement de think tanks ou de fondations qui promeuvent indirectement leurs intérêts. Ainsi la fondation General Electric consacre-t-elle une partie de ses activités au financement de programmes visant à influencer les politiques publiques.

DIMENSION SOCIALE

Il n'en demeure pas moins que les activités des multinationales doivent être régulées. Le naufrage du groupe américain Enron en 2001 et les excès révélés par la crise financière que nous venons de vivre en témoignent.

Pour pallier ces dérives, la présidence française du G20 a annoncé son intention d'oeuvrer en faveur du renforcement de la régulation financière et de lutter contre la corruption. Le défi consistera à proposer des réformes de fond susceptibles d'être acceptées par toutes les parties prenantes. Il s'agit d'un enjeu politique complexe puisqu'il pose le problème de la coordination et de l'harmonisation des cadres législatifs à l'échelle internationale.

Quelle proposition concrète permettrait de mieux réguler l'activité des multinationales ?

La France a été l'un des premiers pays à inscrire dans sa loi, en 2010, l'obligation pour les entreprises de produire un rapport annuel d'activité comprenant non seulement les indicateurs de performance financière, mais aussi ceux de performance sociale et environnementale.

Elle pourrait profiter de sa présidence pour essayer d'imposer ce cadre comme une nouvelle norme internationale en matière de "reporting". Un tel projet permettrait de mobiliser à la fois les autorités publiques, les chefs d'entreprise et les représentants du secteur social avec lesquels la présidence française a annoncé son intention de travailler.

L'adoption de cette norme permettrait non seulement d'éviter certaines dérives financières, mais aussi de lutter plus efficacement contre la corruption et de renforcer la dimension sociale de la mondialisation.


Julie Battilana, professeur assistant à la Harvard Business School
 

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