Le ministre français de la justice ("keeper of the seals") Pascal Clément était hier à Washington.
Il a tenu une réunion de coordination anti-terroriste franco-américaine (avec Bruguière et les magistrats du parquet de Paris).
Il a discuté et déjeuné avec l’attorney general Alberto Gonzales.
Ils ont parlé de Guantanamo.
Gonzales ne lui en n’a pas dit un mot.
C’était pourtant l’info du jour.
Les Etats-Unis vont appliquer une partie des Conventions de Genève aux prisonniers de l’anti-terrorisme.
Le ministre français, soit dit en passant, n’a pas évoqué la "fermeture" de Guantanamo.
Vous aviez remarqué, vous ?
La France, apparemment, n’a pas réclamé la fermeture de la prison (au contraire de Merkel).
Mais les Américains auraient "compris le message" sans qu’on réclame.
Passons…
Article 3
Cette histoire, parce qu’elle illustre la manière dont l’administration Bush réagit à la décision de la Cour Suprême sur Guantanamo.
A minima.
- "Lip service", comme dit le New York Times.
Le Pentagone a tenté de faire passer ce revirement par la petite porte.
Il aurait du laisser cela à Condoleezza Rice.
Elle aurait organisé une vraie cérémonie, comme quand la Maison Blanche a changé de cap sur l’Iran.
Au moins, Washington aurait eu des retombées en terme d’image.
Là, c’est un peu la pagaille.
Il n’est même pas clair si les détenus "secrets" de la CIA (trois douzaines, d’après la presse) sont concernés.
Checks
L’objectif du Pentagone est de se conformer tout en ne faisant pas un geste de plus.
La Cour a invalidé les commissions militaires ? La Maison Blanche essaie d’en obtenir la création par le Congrès.
Elle tente d’obtenir par la voie législative ce que les juges lui ont retiré le 29 juin (dans une magnifique démonstration du système de checks and balances, cela dit)
Comme dit le Washington Post, c’est
- "Bush way or the Highway".
Que l’on peut traduire par: "si t’es pas content, va te perdre sur l’autoroute".
Anti-Statue
Côté voyages, le sénateur Joe Biden a conseillé aux fonctionnaires du ministère de la justice et de la défense d’en faire plus souvent.
IL revient de sa 7ème visite en Irak.
Il trouve que le gouvernement ne prend pas assez la mesure de la symbolique de Guantanamo.
Longtemps après que les détenus ne sont plus systématiquement en orange, il n’est qu’à voir les protestations en Europe.
Orange, à toutes les manifs. Guantanamo pourrait être transformé en Club Med, ça resterait le point focal de l’opposition anti-Bush.
Pour des experts de la "com" comme les républicains, il y a quelquechose d’irrationnel.
Biden a cité Tom Friedman et sa chronique de fin mai.
- "Just shut it down".
Pour lui, Guantanamo est "l’anti statue de la Liberté".
Epilogue
On ne le répètera jamais assez: Donald Rumsfeld a -littéralement- reçu un avion sur la tête le 11 septembre 2001.
Hier, l’un des experts qui témoignaient au Sénat était Theodore Olson.
Il était jusqu’en 2004 l’avocat général de la Maison Blanche.
Il estime que le Congrès devrait tout simplement annuler la décision de la cour suprême donnant des droits aux détenus, dont celui d’avoir un avocat civil.
Sa femme était dans l’avion qui s’est écrasé sur le Pentagone.
Il faudra peut-être attendre qu’une génération politique soit passée.