15 mars 2011

 «Ne pas postuler à Sciences Po, c’est être has been!» Ce cri du cœur, nombreux sont aujourd’hui les élèves à le lancer tant passer par Sciences Po Paris est devenu tendance. Mais Sciences Po c’est également un enseignement de haut niveau et de bonnes perspectives d’emploi. Du moins si on choisit les voies de spécialisation les plus porteuses. Car, vous le verrez, les salaires des débutants peuvent varier quasiment du simple au double selon le master - et le domaine professionnel - choisi. 

Un homme est plus que tout à l’origine de cet engouement

En créant en 2001 la filière ZEP permettant à des jeunes issus de milieux défavorisés d’intégrer ce temple de la bourgeoisie parisienne, Richard Descoings, le directeur de Science po Paris. a su redonner un coup de jeune à une belle endormie. Depuis, il a multiplié les voies d’accès comme les implantations en dehors de Paris (Dijon, Le Havre, Menton, Nancy, Poitiers, Reims) et, cette année, vient de rénover un concours qui a désormais lieu au moins de juin et non plus à la rentrée comme auparavant.

«Nous essayons dans notre collège universitaire de conjuguer les avantages des classes prépas et ceux des collèges britanniques ou américains, m’expliquait ainsi Richard Descoings (lire l’entretien complet sur lemonde.fr). Tout le monde dit que parmi les plus grandes qualités qu’on attendra des jeunes dans les années à venir il y a l’esprit de créativité et d’innovation. Pour les aiguiser, nous encourageons la pratique artistique avec des ateliers de photo, théâtre, écriture, etc. On dit que les jeunes générations devront être multiculturelles et plurilingue. Nous recevons, sur nos sept campus, 40% d’étudiants étrangers et la troisième année se déroule obligatoirement hors de France. Je vois nos étudiants revenir de Calcutta ou de Tokyo des étoiles plein les yeux.» Si vous vous intéressez aux idées de Richard dscoings, suivez le sur son blog ou en devenant son ami sur Facebook

Quatre voies d’entrée à Paris

Le concours est loin d’être la seule voie d’entrée. Avoir une mention très bien vous donne par exemple le droit de postuler directement. «Nos quatre voies d’accès correspondent à quatre profils différents, m’expliquait ainsi Hervé Crès, directeur adjoint de Sciences Po Paris. En recevant sur dossier des titulaires d’une mention très bien au bac, nous recrutons d’excellents élèves venus de toute la France qui ont su jouer le jeu du lycée dans toutes les matières. Par l’examen d’entrée, nous recherchons des candidats capables de se concentrer pendant deux jours sur des épreuves difficiles: en maths par exemple, il faut travailler sur un seul problème pendant 3 heures, pas sur de petits exercices.»

Quant aux fameuses conventions d’éducation prioritaires, elles permettent à l’institut de la rue Saint-Guillaume d’aller à la rencontre de jeunes «qui ont un grand potentiel, ont souvent d’ailleurs obtenu une mention très bien au bac, mais n’auraient pas imaginé par eux-mêmes possible d’entrer à Sciences Po». Enfin, la voie internationale permet d’intégrer 30% d’étrangers (40% avec les échanges) et de créer la «diversité culturelle que nous estimons aujourd’hui indispensable».

Une école leader

Une fois reçus à Sciences Po Paris, les étudiants y suivent un cursus de cinq ans qui leur permet d’acquérir une grande culture générale avant de choisir une spécialisation dans l’un des 14 masters (affaires européennes, carrières judiciaires et juridiques, finance et stratégie, etc.). Il est également possible d’intégrer Sciences po en master mais il est dommage de rater une troisième année qui se déroule obligatoirement à l’étranger et reste pour toujours le meilleur souvenir des étudiants. Ils peuvent en effet se rendre dans les plus grandes universités du monde grâce à la notoriété d’une école qui, si elle n’en est pas moins grande, se revendique comme une université sélective avec un statut de «grand établissement».

Mais pourquoi choisir Sciences Po et pas HEC ou l’Essec par exemple? A cette question, Hervé Cres, lui même ancien directeur de la grande école d’HEC, me répondait ainsi: «La question est d’abord celle ou non de la classe prépa. A Sciences-Po, les élèves trouvent un environnement international et diplômant quand les prépas sont franco-françaises et non diplômantes. Ensuite, tout dépend de sa vocation. Pour étudier la communication ou les affaires internationales, il est logique de venir chez nous. Dans les masters où nous sommes en concurrence avec les grandes écoles de commerce, comme le marketing ou la finance, nous ne proposons pas les mêmes méthodes. Nous insistons par exemple sur l’histoire pour comprendre le présent. En ces temps où les questions collectives redeviennent centrales, le modèle Sciences Po a le vent en poupe!»

Pas qu’à Paris! Pas que dans les IEP!

A côté de Sciences Po Paris, il existe huit autres IEP (instituts d’études politiques) à Aix-en-Provence, Bordeaux, Grenoble, Lille, Lyon, Rennes, Strasbourg et Toulouse, dont six recrutent sur un concours commun. S’ils stigmatisent souvent le développement en région de leur grand frère parisien, ils mesurent aussi combien le buzz continu autour de la marque Sciences po leur est profitable et l’abordent donc fièrement sur leurs sites. “Le Monde” y revient dans un dossier spécial du dernier “Monde Education”.

Et, on en parle finalement assez peu, les sciences politiques sont largement enseignées en dehors des IEP. Une université comme Nanterre propose ainsi une licence en science politique accessible à bac+1 puis un master en travail politique et parlementaire dont la réputation n’est plus à faire. A l’université de Clermont-Ferrand, vous pouvez vous spécialiser en science politique pendant la 3ème année de votre licence de droit. Il n’y pas que Sciences po pour faire des sciences politiques…

Mais que deviennent-ils?

Selon l’enquête d’insertion de Sciences Po Paris portant sur l’ensemble ses diplômés 2009 et 2008, ils se sont intégrés dans le monde du travail dans les secteurs suivants :

  • Finance / Comptabilité / Gestion administrative         21%
  • Conseil                                                                                17%
  • Marketing / Communication                                            13%
  • Relations internationales / Sécurité                              10%
  • Juridique                                                                             7%
  • Ressources humaines                                                    4%
  • Direction et gestion d’entreprise                                    4%
  • Enseignement et recherche                                           3%
  • Environnement                                                                  3%
  • Edition                                                                                 3%
  • Aménagement / Urbanisme                                           3%
  • Santé et social                                                                   2%
  • Production / Logistique                                                    2%
  • Achats / Ventes                                                                  2%
  • Autres                                                                                  6%

1 an après l’obtention du diplôme, ils sont (ou étaient pour la promotion 2008 qui a plus souffert de la crise lors de son insertion professionnelle):

                                                  Promotion 2009                 Promotion 2008

  • CDI                                        53%                                       53%
  • Fonctionnaire                      16%                                       5%
  • Agent contractuel
  • du service public                11%                                       6%
  • Indépendant et
  • création d’entreprise         4%                                         8%
  • Total emploi stable           84%                                       71%
  • CDD                                      15%                                       23%
  • VIA/VIE                                   1%                                         6%

Quant à la rémunération moyenne, elle dépend (fortement !) du master préparé. Là aussi, les effets de la crise de 2008 se font sentir puisque la moyenne du salaire moyen 2009 est de 3300 euros supérieure à celle du salaire moyen des diplômés de 2008 : 37,1 k€ bruts annuels contre 33,9 k€ bruts annuels en 2009. Avec de fortes différences en fonction du sexe 34,4 k€ bruts annuels pour les femmes (il est vrai moins présentes dans les masters les plus rémunérateurs) et à 41,1 k€ bruts annuels pour les hommes.

Le salaire moyen 1 an après l’obtention du diplôme (promotion 2009)

  • Ecole de droit - Droit économique                                 52 344
  • Finance et stratégie                                                          47 237
  • Economics and public policy                                          44 833
  • Gestion des ressources humaines                               40 652
  • Affaires européennes                                                       36 609
  • Affaires internationales                                                    36 219
  • Urbanisme                                                                          35 847
  • Affaires publiques                                                             33 396
  • Ecole de la communication                                             31 773
  • Stratégies territoriales et urbaines                                 31 368
  • Marketing et études                                                           30 340
  • Ecole de journalisme                                                       29 719
  • Ecole de droit - Carrières judiciaires et juridiques     28 833

 

Points forts et points faibles vus par l’Aeres

A tous ceux qui veulent se faire une opinion précise sur l’IEP (institut d’études politiques) de Paris, je conseille la lecture du rapport 2008 de l’Aeres (Agence d’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur). En résumé, l’Aeres décrivait ainsi les points forts de Sciences Po Paris :

- des marges de manoeuvre conférées par un statut juridique singulier mêlant droit privé et droit public ;

- une gouvernance centralisée solide et incontestée au service de la diffusion d’une culture d’entreprise en interne ;

- une adhésion forte des personnels à la politique de l’établissement ;

- la réputation des formations ;

- un projet éducatif fondé sur une vision « humaniste » ;

- une grande capacité de réactivité au changement et d’innovation ;

- une aptitude à se situer dans les réseaux de pouvoir et à assurer une communication institutionnelle efficace ;

- la capacité effective de lever des fonds auprès d’acteurs privés ;

- une attractivité pour des professionnels de haut niveau ;

- un engagement déterminé à l’international.

Et ses points faibles :

- une démarche insuffisamment prospective sur les conséquences internes et externes induites des changements projetés ;

- l’insuffisante lisibilité sur les conséquences pédagogiques des délocalisations et de l’extension sur Créteil ;

- une relative inadaptation de la gouvernance de la recherche aux projets de Sciences Po ;

- un potentiel de recherche insuffisant et déséquilibré dans les disciplines ;

- un potentiel d’enseignants permanents insuffisant au regard des projets de développement, tant en formation initiale qu’en formation continue ;

- des tensions potentiellement stérilisantes entre, d’une part « l’excellence et l’ouverture » et, d’autre part « discipline et thématique » ;

- une diversité excessive de l’insertion professionnelle et de la reconnaissance des diplômés;

- des instruments de pilotage et un système d’information globalisé encore très perfectibles (manque de reporting) ;

- une gestion globalement maîtrisée mais déraisonnable au niveau de certains coûts de fonctionnement.

  • Vous pouvez aussi réagir sur lemonde.fr à l’entretien que j’ai eu avec Richard Descoings.

Commentaires

  1. En tout cas, la formation reste à parfaire en mathématiques : des moyennes salariales de 34,4k€ pour les femmes, 41,1k€ pour les hommes, qui aboutissent à une moyenne globale de 33,9??? Ou alors ce sont les diplômés martiens qui font baisser la moyenne…

  2. @Jacques : 33,9 k€ bruts est le salaire moyen annuel de la promotion 2008, il est 37,1 k€ bruts annuels pour la promotion 2009

  3. “Un structure très différente des autres IEP qui, eux, continuent toujours à être d’abord tournés vers la fonction publique.”
    En quoi les chiffres présentés précédemment (par secteurs d’activités dans lesquels n’apparaîssent pas “secteur public”) le prouve ?
    Les chiffres suivant montrent que 27% intègrent de fait la fonction publique (16% fonctionnaire, 11% contractuels). Est-ce si différent des IEP (absence de chiffres les concernant) ?
    Et puis pour mémoire ce sont des chiffres un an après la sortie d’écoles. Combien prépare encore un concours à ce moment là (ENA,…)?

  4. @Sarah : Oui effectivement il faudrait nuancer. Deux exemples:

    Sciences Po Rennes, promotion 2007, répartition par secteur d’activité:
    * 48 % en Entreprise privée
    * 16 % dans le secteur Associatif
    * 5 % en entreprise publique
    * 17 % dans la fonction publique d’Etat
    * 14 % dans la fonction publique territoriale

    A Sciences Po Lyon, les diplômés 2009 sont à 53% sont dans le secteur privé, contre 46% dans le secteur public (http://iep.univ-lyon2.fr/images/upload/portfolio_img/pr_senta_enquet_2009_1.pdf)

  5. Votre article est quelque pu réducteur. Ce que vous ne mentionnez bizarrement pas, ce sont les moyens colossaux que s’arroge l’IEP de Paris au détriment de ceux de province via la FNSP, facilitant grandement son expansion. Effectivement, si les autres IEP disposaient des mêmes moyens, vous verriez effectivement des “antennes” fleurir sur le même modèle que celui de Paris et à l’étranger et disposer de moyens pour le corps professoral autrement plus importants. Mais visiblement, cela n’a pas l’air d’avoir gêné votre analyse bien incomplète qui ressemble effectivement plus à un publi-reportage qu’à une analyse objective des IEP aujourd’hui. Contrairement à ce que vous pensez, Sciences Po a besoin de se valoriser car à force de tout vouloir faire, on ne comprend plus rien à son positionnement. Et effectivement, les autres IEP restent entre autres, sur la discipline reine de leur raison d’être depuis leur création, à savoir la formation d’un corps administratif de grande qualité. Vous oubliez de dire également que l’IEP de Paris est le seul à ne pas se rattacher à une université (contrairement aux autres IEP), ne respectant pas les directives de la FNSP sur le rattachement de chaque institut à son académie d’origine. Pourquoi cette exception ?
    Votre papier est trop sommaire et à sa lecture, orienté, quoique vous pensiez. Pour preuve, la déclaration d’Hervé CRES, qui privilégie le modèle Sciences Po Paris à HEC alors que lui-même est diplômé de Sciences Po Paris (http://econ.sciences-po.fr/sites/default/files/CV%20Herv%C3%A9%20Cr%C3%A8s.pdf). Ce n’est pas très sérieux. Et dire que les autres IEP profitent de “buzz” suscité par Sciences Po Paris, je m’étouffe de rire.

  6. @Beausol : Sur le buzz de Sciences Po je peux vous dire que c’est un directeur d’IEP qui me l’a dit et qui arbore d’ailleurs fièrement le nom de Sciences Po plutôt que celui d’IEP comme c’était encore le cas il y une dizaine d’années. Qui parle encore d’IEP d’ailleurs alors que Sciences Po est initialement la marque du seul IEP de Paris?
    Sinon, ce n’est effectivement qu’un post sur un blog pas un article complet comme nous pouvons en publier sur la rubrique éducation du monde.fr. Il s’agit de créer un débat et je vous remercie d’y participer et de l’éclairer.

  7. @olivier Rollot. Ma charge a été un peu forte et je vous concède largement qu’un blog n’est pas un article. Je vous remercie d’ailleurs pour cet espace d’expression.
    Ce que je peux vous dire, c’est que dans les recrutements que nous effectuons, la mention IEP est importante (vous le voyez d’ailleurs dans les principaux sites de recrutement pour la qualification des profils) pour la simple raison que certaines personnes diplômées de l’Université en sciences politiques mettent “Sciences Po” dans leur CV, pour le valoriser.
    Pour revenir à la ligne directrice de votre réflexion, les IEP sont surtout d’excellentes formations généralistes qui attisent la curiosité intellectuelle, l’analyse et le sens critique, primordiales pour s’adapter en milieu professionnel via la Culture Générale et Economique qu’elles confèrent. La diversité des Masters complète cette formation de base et pour ma part, la plupart des anciens de notre IEP (aux senteurs viticoles) que je fréquente, très actif en association, sont très présents dans les media, en cabinets ministériels, administrations centrales, dans le conseil en management ou dans les fonctions marketing.

  8. @Beausol : Oui effectivement et je vous livre un autre extrait de mon entretien avec Richard Descoings qui me disait: “Dans nos gênes, il y a l’idée que le meilleur terreau d’une vraie professionnalisation est une formation intellectuelle fondamentale. On ne peut pas dire aux jeunes qu’ils vont changer trois ou quatre fois de métier dans leur vie, que les techniques qu’ils utilisent aujourd’hui ne sont pas celles qu’ils utiliseront dans 10 ou 20 ans, et leur donner une formation uniquement technique.”
    @Tous : En tout cas merci encore une fois de participer à des débats qui sont souvent de haute tenue.

  9. On peut aussi faire de la science po en fac et c’est très bien : http://sciencepolitiquenice.wordpress.com/

  10. Je suis étudiant en deuxième année à Sciences Po et je peux vous dire que la situation est loin d’être aussi idyllique que ce ce que vous nous décrivez.
    Depuis dix ans, Richards Descoings a lancé un grande entreprise de réforme de Sciences Po visant à changer totalement son modèle pour passer d’une grande école destinée d’abord à former les cadres de la haute fonction publique à une université à l’anglo-saxonne, attrape-tout et où la quantité prime sur la qualité.
    Tout d’abord, contrairement à ce que vous dites les trois ans du diplôme “bachelor” (l’anglicisme ici n’est pas gratuit) sont générales sans être encadrées et assez intensives pour qu’elles aient un véritable interêt intellectuel. Les choix de cours sont extrêmement vaste mais comprennent énormément d’escroqueries intellectuelles pures et simple aux dépends des matières importantes (depuis cette année, les premières années étudient en 24h en tout l’histoire de 1750 à 1914, en 24h également les droit constitutionnel français et européen…). En seconde année il y a certes des cours très intéressants mais aussi énoméments d’électifs assez affligeants que ce soit en matière de business ou franchement des artefact comme par exemple « histoire du manga »… Enfin la troisième année peut être très bien mais elle s’inscrit en fait surtout dans une idéologie qui privilégie une superficialité “multiculturaliste” à tout sérieux intellectuel. Je ne suis pas sûr qu’aller faire du surf pendant un an en Australie avec 8H de cours par semaine – et j’en connais réellement – est la formation idéale dont nos élites ont besoin…
    Ensuite les voies d’admission parallèles – mention très bien et convention ZEP – en plus d’être une scandaleuse rupture avec la méritocratie républicaine favorisent respectivement des gens très scolaires (et quand on connaît l’état du lycée aujourd’hui ce n’est pas glorieux… ) et des « profils singuliers » qui ont souvent bien du mal à suivre le rythme (et surtout n’essayez pas d’avoir le taux de redoublement des entrants par CEP, c’est un secret très bien gardé…).
    De plus l’augmentation rapide du nombre d’étudiants (triplé depuis dix ans) se fait aux dépends de la qualité de l’enseignement, l’achat de nouveaux bâtiments ne suffit pas à suivre le rythme.
    Plus globalement, la volonté de Richard Descoings de généraliser Sciences Po à marche forcée en fait petit à petit une « école de commerce plus » avec des masters finances, marketing, communication, DRH, droit économique de plus en plus fournis. On y rencontre ainsi souvent des gens qui veulent avant tout « gagner de l’argent »… Je crois que les fondateurs de l’Ecole Libre des Sciences Politiques qui créerent l’institution pour mieux former l’élite de la Nation après la débâcle de 1870 pleurerait aujourd’hui en voyant à quel point le sens de l’Etat disparaît au profit de l’esprit de lucre…
    Etudiant entré sur concours en 2009 et se destinant au service de l’Etat si je dois donner un conseil à un lycéen ce serait de choisir plutôt une classe prépa littéraire du moins dans un premier temps. Là-bas, la rigueur intellectuelle et le sérieux lui apporteront les fondations de la culture classique qui – bien que trop rares de nos jours – sont indispensables à la réflexion. Ensuite s’il se destine à l’administration il pourra entrer en master – dans le meilleurs des cas après avoir fait l’ENS, sinon après avoir cubé sa prépa.
    J’avais moi-même été accepté en hypokhâgne à Henri IV et je regrette aujourd’hui de l’avoir quitté pour Sciences po, ne commettez pas la même erreur que moi. Et sachez également – autre chiffre que la direction ne révélera jamais – que si le master affaire publique reste une excellente – la meilleure – préparation aux grands concours administratifs, la grande majorité des diplômés de Sciences Po entrant à l’ENA ne sont pas des purs Sciences Po mais seulement des masters ayant fait une classe prépa puis souvent l’ENS ou HEC…

  11. Histoire vraie : je me souviens lorsque j’étais étudiant en master à l’Université Paris 1 (il n’y a donc pas si longtemps), des connaissances de science-po venaient me demander moyennant une petite rémunération de rédiger leurs dissert’ ou exposés en sciences économiques humaines et sociales. Par chance, une fois, le sujet proposé à l’IEP rue Saint-Guillaume était très proche de celui que j’avais eu quelques mois auparavant dans mon Université. J’ai donc tout simplement recopié mon travail. Résultat obtenu : 18/20 à l’IEP, 12/20 en Fac. Moralité : Science-Pipo ce n’est que du réseau social, des arrangements entre bonnes familles et du bourrage de crâne. Science-Pipo est une école de commerce pour une bourgeoisie (si possible affilié UMPS) en mal de légitimité. Il y a plein de bouquins là-dessus écrit par des sociologues sérieux.

  12. “et surtout n’essayez pas d’avoir le taux de redoublement des entrants par CEP”
    Il est inférieur à celui des entrants concours et mention très bien, les chiffres sont publiés chaque année par la direction des études et de la scolarité…
    Mais merci tout plein pour ce préjugué qui fleure tellement bon l’élitisme mal placé.

  13. ““et surtout n’essayez pas d’avoir le taux de redoublement des entrants par CEP”
    Il est inférieur à celui des entrants concours et mention très bien, les chiffres sont publiés chaque année par la direction des études et de la scolarité…
    Mais merci tout plein pour ce préjugué qui fleure tellement bon l’élitisme mal placé. ”

    Si tel est le cas j’aimerais beaucoup voir la publication en question que je n’ai jamais trouvée - et pourtant j’ai cherché… Montrez-nous donc ces fameux chiffres.
    En tout cas ce que je peux vous dire c’est qu’empiriquement dans les personnes que je connais qui ont redoublé les CEP sont extrêmement surreprésentés…
    D’ailleurs cela me rappelle qu’au dernières nouvelles Sciences Po n’avait toujours pas osé publier ses chiffres de redoublement pour l’année dernière (voir là-dessus cet article du journal étudiant datant de septembre dernier : http://www.lapeniche.net/actualite/index.php/post/2010/09/17/Un-taux-de-redoublement-record-en-premi%C3%A8re-ann%C3%A9e )…

  14. Le seul chiffre vient du blog de Richard Descoings (http://www.richard-descoings.net/2010/03/12/les-chiffres-cles-des-cep/) et il est très vague : “9 sur 10 [des étudiants issus des CEP] passent directement à l’année supérieure”. Cela nous ferait donc 10% de redoublants en CEP.
    Or d’après les chiffres donnés par Sciences Po (http://formation.sciences-po.fr/sites/default/files/cd_cp/cp2010/PVCP20101108.pdf je viens de voir ça, je ne suis pas sûr que ce soit très fiable mais bon…) il y aurait eu 6% de redoublants cette année ce qui donnerait un taux quasiment deux fois supérieur de redoublement chez les CEP…
    De plus le 1/10 redoublant est présenté comme une moyenne or avant cette année il y avait - de l’aveux même de Richard Descoings (voirhttp://www.youtube.com/watch?v=6cOoDxFhy4Q) - ce qui donnerait pour les années précédentes un taux de redoublement plus de trois fois supérieur pour les CEP par rapport au reste des étudiants…

  15. Les liens n’ont pas marché, je les remets dans l’ordre :
    http://www.richard-descoings.net/2010/03/12/les-chiffres-cles-des-cep/
    http://formation.sciences-po.fr/sites/default/files/cd_cp/cp2010/PVCP20101108.pdf
    http://www.youtube.com/watch?v=6cOoDxFhy4Q

  16. L’augmentation du nombre d’étudiants est un argument phare et faux usé à tort et à travers pour dénoncer une sorte de baisse de niveau. Le nombre d’étudiants français admis depuis 1995 reste sensiblement le même (+100): c’est le nombre d’étudiants étrangers qui a considérablement augmenté (+400). Des étudiants d’Ivys League, d’Oxford, mais aussi d’écoles moins connues sur la scène occidentale et recelant pourtant d’excellents éléments.
    Est-ce cela que vous appelez une baisse de niveau? La promotion 2009 dont vous faites partie compte plus de boursiers que les précédentes, c’est vrai…et 80% de bacheliers ayant eu plus de 17/20, record absolu. Le niveau ne baisse pas: l’école ratisse plus large, cherche des talents, et les forme afin de rattraper un éventuel “retard”. C’est bien l’objectif d’une vraie formation, non?

    Tous ces chiffres sont disponibles sur le site de Sciences Po et sur le blog de Richard Descoings. Ce qui est à mon sens plus honnête que d’imaginer de soi-disants chiffres catastrophiques sur les taux de redoublement des étudiants venus de ZEP.

    Pour le reste, il est évident que Sciences Po ne requiert pas la même charge de travail académique qu’une prépa commerce-littéraire. Vous devriez néanmoins être le premier à savoir que ce temps libre peut et doit être occupé par des engagements associatifs. Syndicats, think-tank, associations de bénévoles sont extrêmement actifs à Sciences Po.

    Je suis le dernier à considérer que cette école ne puisse être critiquée, et ce sous de nombreux jours. Mais arguer d’une baisse de niveau, sans doute lier à une démocratisation rampante, est à la fois irresponsable, irréel et malhonnête.

    Que Sciences Po - et dans la foulée toutes les grandes écoles - se démocratise(nt): voilà ce dont ont vraiment besoin nos “élites”.

  17. “80% de bacheliers ayant eu plus de 17/20, record absolu” Je suis désolé de vous dire que pour avoir 17 au bac il suffit d’être “appliqué”, le niveau de l’épreuve d’histoire du bac n’a absolument rien à voir - croyez-moi - avec celui du concours. Avant on demandait aux étudiants de Sciences Po une vraie capacité d’analyse, je n’ai qu’à constater devant beaucoup des exposés de mes camarades que les temps ne sont plus ce qu’ils étaient…
    Pour le nombre croissant d’éleves, je vous ferai seulement remarqué que je ne l’ai nullement corrélé avec la baisse de niveau, j’ai seulement dit que les conditions pratiques de travail s’en trouvaient compromises. La baisse du niveau est due aux deux filières parralèles d’entrée, si le concours était resté la seule voie (le taux de réussite restant à 12-13%) rien n’aurait changé.

    Et, au risque de paraître rigide, je vous ferai remarquer que l’enseignement associatif ne remplacera jamais la lecture de Virgile dans le texte où la réflexion sur les philosophes idéalistes allemands…

    La formation des élites n’a pas à être démocratique avant d’être efficace, c’est l’inverse. C’est l’école primaire et secondaire qui doit faire en sorte que la sélection méritocratique des grandes écoles ne soit pas biaisée socialement et aujourd’hui elle n’en est plus capable (dans les années 70, le taux de fils d’ouvriers et d’employer à l’ENA était incomparablement supérieur à aujourd’hui…). C’est à l’école primaire et secondaire qu’il faut reprocher l’auto-reproduction des élites, pas à des grandes écoles qui se contentent de prendre les meilleurs d’où qu’il viennent remplissant là leur mission premiere depuis Bonaparte : former des cadres efficaces pour la Nation…

  18. Science po: “l’école sans savants”. P Bourdieu (ENS)

  19. @vogelsang : Effectivement l’Aeres pointait en 2008 dans les points faibles de Sciences Po “un potentiel d’enseignants permanents insuffisant au regard des projets de développement, tant en
    formation initiale qu’en formation continue”

  20. @Louis (et son histoire vraie) : je vous rejoints, j’ai pu plus d’une fois constaté le niveau affligeant des étudiants de Science-po (cependant mon expérience se réduit aux étudiants du Master Affaire européenne et Affaire internationale).

    Il faut arrêter de voir en Science-po une école capable de fournir une excellente formation intellectuelle.

  21. Bonjour,
    Je me permets de réagir tant le dernier commentaire me hérisse le poil. “j’ai pu plus d’une fois constaté le niveau affligeant des étudiants de Science-po” et d’autres piques anti-Sc Po du même acabit. J’ai fait une prépa, je suis normalienne, ai un master de Columbia University, suis doctorante à Paris IV et en master à Sc Po et à l’essec, je pense être donc suffisamment bien placée pour vous assurer que en master en tout cas, les étudiants bossent non stop, que le niveau est très dur et exigeant, et que j’ai toujours trouvé que le niveau de mes camarades à Sciences Po était très élevé. C’est la meilleure des formations que j’aie faite. Et que ceux qui disent que c’est “trop général” ou “pipeau” viennent suivre nos cours, faire nos exposés et nos galops (partiels) de 5 heures! Avoir de bonnes notes n’est pas du tout simple, on travaille tous dur, on est littéralement sur les rotules (c’est le cas de tous les étudiants, pas seulement les “bosseurs”) et un diplôme de cette école vaut beaucoup. J’apprécie le fait qu’il y ait beaucoup d’étrangers et surtout que l’administration essaie de se calquer sur le modèle anglo-saxon, comme toutes les grandes institutions mondiales aujourd’hui. Cela nous donne beaucoup plus de crédibilité. Alors arrêtez de critiquer Sciences Po en répétant les mêmes stéréotypes, sans avoir vécu et expérimenté de l’intérieur ce milieu là. Et rappelez vous que les années bachelor et master sont très différentes. En tout cas moi j’y ai passé les années les plus stimulantes intellectuellement de ma vie, enfin avec mon hypokhâgne/khâgne bien sûr! Je vais être triste de partir en juin…

  22. @ Cassandre
    Tes commentaires sont nuls et affligeants. J’ai passé plusieurs années dans cette école et tu te trompes sur plusieurs points. Notamment sur le niveau des élèves, comme plusieurs de tes amis. Je travaille maintenant dans la diplomatie francaise et la plupart des gens autour de moi ont fait Sc Po. Vous allez me dire réseau, piston etc… Faux, la plupart sont tout simplement bons et biens formés. Ils tiennent même la dragée haute aux étudiants sortis des plus hautes universités anglo-saxonnes. Si vous n’êtes pas contents de votre formation, mon cher deuxième année vous pouvez partir de l’école. Vous faites partie de cette élite parisienne qui trouve ça chic de snober Sc Po. Au bout de deux ans, sans même un diplôme et une expérience personnelle valable? Quelle prétention, et c’est tellement français de cracher dans sa soupe… Si vous allez en Master ( si vous êtes suffisamment bon pour, je n’ai pas l impression que vous ayez le niveau pour vu votre argumentaire), que vous obtenez votre diplôme et que vous travaillez, merci de partager votre expérience sur le niveau de cette école. Pour l’instant, retourne bosser, t’as la définition du PIB à apprendre.

  23. @Cassandre : Je n’interviens que pour faire ma vilaine (dans tous les sens du terme, c’est que je n’appartiens pas à l’élite, moi) mais pour quelqu’un qui pérore sur la baisse de niveau de la formation des élites, écrire “je vous ferai seulement remarqué”, c’est… rigolo ?

  24. Article assez instructif

  25. “Et, au risque de paraître rigide, je vous ferai remarquer que l’enseignement associatif ne remplacera jamais la lecture de Virgile dans le texte où la réflexion sur les philosophes idéalistes allemands…”

    Si je vous accorde que la lecture de Virgile dans les textes puisse être (très) bénéfique, j’ajouterai - au risque de vous paraître moderne - qu’elle ne saurait être dissociée d’un engagement associatif. Sciences Po n’a pas vocation à remplir les chaires des universitaires; son rôle n’est pas de former l’excellence académique de demain: ceci est l’ambition, entre autres, de l’E.N.S.

    Sciences Po prétend former des cadres d’entreprise, des politiques, des sociologues, des journalistes. A n’en pas douter, la lecture de Virgile les aidera. Mais concrètement, ce sont les expériences humaines qu’ils vivront dans les prisons, les hôpitaux et les banlieues défavorisées qui forgeront leur personnalité. Ce sont ces engagements qui les rendront sensibles, ouverts et les empêcheront de se déconnecter d’une réalité si facile à omettre quand on travaille dans les beaux quartiers du boulevard Saint-Germain.

    En bref: c’est ce qui les empêchera d’être perçus comme des “technocrates” sclérosés vivant dans leurs cénacles. Et c’est une excellente chose.

    Enfin il est assez amusant de vous voir citer Virgile, quand on sait qu’il était le premier à inciter les politiques Romains à revenir aux champs afin d’être au fait de la réalité (cf. Bucoliques, V). Je ne peux donc à mon tour que vous inviter à relire Virgile “dans les textes”.

    P.s: Arrêtez de penser que Sciences Po se considère comme l’élite, la fine fleur de la France Parisienne. Quelques chiffres, que je laisse à votre jugement, plutôt que de longs discours, et que je vous incite à aller comparer avec ceux d’autres “grandes” écoles.

    -25% de boursiers.
    -15% de Parisiens; 36% “provinciaux” (Pour peu qu’on considère encore Lyon & Bordeaux comme la province…); 40% étrangers; 9% autres (DOM-TOM)
    -Des frais d’inscriptions (très) régressifs en fonction du revenu des parents (8000€ à 0€)
    -17,5: moyenne minimum au BAC pour présenter son dossier et avoir une chance de rentrer. C’est cela, Cassandre, que vous appelez une déchéance académique?

  26. @LB
    Je suis d’accord sur certains points concernant la politique de Descoings que je suis le premier à critiquer étant moi-même élève à sciences-po. C’est vrai qu’il a une conception de ce que doit être sciences-po qui n’a rien à voir avec ma vision républicaine et ma volonté de servir l’État, que je pense être tout de même plus proche de la vision de Boutmy de sciences-po que de celle d’une école de commerce. Mais concernant les résultats d’admission à l’ENA, je reste perplexe. La préparation aux concours est, depuis quelques années déjà, réservée exclusivement aux étudiants diplômés de sciences-po, j’en tiens pour preuve le site de sciences-po concernant les modalités d’inscription:
    http://prepaconcours.sciences-po.fr/francais/node/11

    Je veux bien critiquer Descoings et ce qu’il apporte à sciences-po (c’est pas en faisant passer le concours à 5000 mauvais élèves de plus qu’on va augmenter le niveau), mais les élèves admis sont souvent, les résultats de la dernière promotion le montrent, d’excellents élèves en eux-mêmes.

    PS:certains cours sont effectivement ridicules, à partir de l’année prochaine, ils vont imposer un atelier artistique au semestre de printemps de 1A, déjà existant, et un au semestre d’automne de 2A. On arrive à n’importe quoi quand on veut tout faire pour s’inscrire dans l’originalité…

  27. Pardon, j’ai mal lu, ce n’est pas “@LB”, mais à “Cassandre”…

  28. A propos du niveau de Science po : En tant que professeur dans divers institutions (y compris quelques heures Rue Saint-Guillaume) je peux vous assurer qu’à Science-Po le niveau n’est ni meilleur ni pire ! Simplement, le public étudiant n’est pas le même que celui de la fac, il est plus “discipliné” si je puis dire, mais le niveau (pour les master surtout) est à peu près égal, voir inférieur si l’on compare avec l’École des Hautes Études en Sciences Sociales (EHESS), Normal Sup’ ou HEC. Une variante importante aussi est le type de master : tous ne se valent pas, loin de là…


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