Art et Architecture Enceinte et Porches La Cour et le Minaret La Coupole du Bahou Le Minaret La Salle de Prière La Coupole du Mihrab Les Plafonds Le Minbar Le Mihrab Les Grandes Formes Décoratives au dessus du Mihrab La Maqsoura
 
Enceinte et porches
 
L’enceinte offre un aspect sévère presque militaire ; elle est hérissée de bastions et contreforts qui se distinguent par leur irrégularité : piliers-contreforts placés d’une façon fantaisiste, sans aucun souci de symétrie. La plupart sont accolés soit directement sur le mur, soit sur d’anciens piliers encore visibles dans la masse. Des signes anciens de déversement semblent avoir nécessité des interventions éparpillées et hâtives. Il est clair que sans ces travaux de consolidation, menés sous le règne du calife almohade al Mansour, lors de son passage à Kairouan en 576 H/1181, mais surtout, à l’époque hafside puis turque, le pire aurait pu se produire.
Les avant-corps des portes se raccordent mal, en général, à l’ancienne maçonnerie ; bref, on a le sentiment qu’il a fallu constamment lutter pour renforcer des murs, qui, à l’origine, n’avaient aucune consistance, donnant ainsi à l’enceinte l’aspect d’une forteresse aux tours et contreforts désordonnés mais harmonieux et majestueux. Seul le mur de la qibla offre une certaine unité, mais cette impression est très vite dissipée en analysant minutieusement les différents éléments de sa façade. Les matériaux utilisés sont très variés; on distingue, à certains endroits, des blocs de pierre taillés et assez bien appareillés, servant de base à des assises en moellons ou en briques cuites et pleines, de différents calibres et appartenant aux périodes aghlabides (les plus grandes) hafsides et ottomanes. Plusieurs banquettes de briques de hauteur variant entre 1,60 et 1,70 m et d’une profondeur qui peut atteindre les 4 ou 5 m, bloquent la base des murs originaux dont la hauteur peut atteindre les 7 m, assurant ainsi une certaine stabilité et solidité qui expliquent comment des matériaux aussi fragiles ont pu résister aux injures du temps et aux poussées de l’intérieur.
Cependant, l’étude du plan ancien de la Grande Mosquée semble attester l’existence, à l’époque de Ziyadat allah, de quatre tours aux quatre angles. Cette disposition nous rappelle le plan de certaines citadelles byzantines et musulmanes et confirme le rôle militaire joué par les premières mosquées qui se transformaient en un lieu de refuge pour la population, une fois les autres lignes de défense franchies par l’ennemi. L’enceinte de la Grande Mosquée de Kairouan est aussi percée de neuf portes; certaines sont datées du XIIIe au XVIIIe siècle. Le géographe oriental al Maqdisi (Xes), suivi par al Bakri, mentionna l’existence de dix portes à la Grande Mosquée. On distingue le Bab as-Simat qui donne sur l’artère principale, Bab as Sarrafin (porte des échangeurs) Bab al-Rahadina (les marchands d’étoffe), Bab al- Sabbaghin (les teinturiers), Bab al Haddadin (les forgerons), Bab Souk al Khamis (marché du jeudi), Bab as Sawmaà (le minaret) qui se trouvait dans le mur nord de la Mosquée, Bab al Khassa (les notables) par où entrent le Sultan et sa suite. Al- Maqdisi précise que cette issue donnait sur la rue des marchands de dattes (tammarin), près de Dar al-Imara qui jouxte la Grande Mosquée du côté sud. Malheureusement, les noms des portes avancés par al-Maqdisi, ayant disparus, il est pratiquement impossible de les appliquer aux ouvertures actuelles connues. Il est probable que l’ancienne porte al Khassa est l’actuelle porte appelée Bab as-Sultan.
Certaines ont du être murées, comme c’est le cas d’une porte se trouvant à la façade occidentale dont il ne subsiste qu’un arc brisé assez nettement appareillé d’une double voussure. La façade occidentale se distingue par la présence de trois porches surmontés de coupoles dont les tambours carrés qui portent aux angles des trompes à trois voussures, sont surmontés de calottes côtelées qui s’inscrivent dans la pure tradition kairouanaise. Construites en briques pleines, elles sont toutes épaulées, de part et d’autre, de contreforts, certes épais et gigantesques, mais qui se distinguent par l’harmonie de leurs corps. Tout semble indiquer qu’elles appartiennent à la même période historique, très probablement l’époque hafside puisqu’une des ces portes, dénommée Bab al Ma (porte de l’eau), porte une inscription commémorative qui la date de 693 H /1293:
Basmala-Taslîa : Ceci est une des choses qu’a ordonné d’exécuter notre seigneur et maître, le khalife, l’imam, al-Mustansir billâh, le fortifié par le secours de Dieu, l’émir des Croyants, ’Abû Hafs, fils des émirs légitimes. Que Dieu éternise leur autorité et qu’Il accroisse leur triomphe ! Qu’Il double leur récompense et leur salaire et qu’Il fasse que les bonnes œuvres constituent leur trésor ! -(Et cela) en l’année 693 (2déc.1293-20 nov.1294).
Il semble que le calife hafside al-Mustansir bi-llah a porté des soins particuliers à l’enceinte et aux porches de la Mosquée, comme l’atteste une plaque commémorative analogue qui se trouve au-dessus de la porte Lalla Rayhana au nom d’une femme ermite dont le tombeau se trouvait adossé au mur oriental de l’enceinte de la Mosquée. Cette porte fut dotée d’un somptueux porche par l’Imam de la grande Mosquée ‘Abd Allâh al-Haskûrî qui y consacra, en 716H/1316, plus de mille dinars.
Le monument est inscrit dans un saillant carré de belle facture, flanqué de colonnes qui portent des arcs outrepassés, surmontés d’une coupole sur trompes côtelée. Hormis l’arabesque de l’intrados des côtes, d’inspiration hispano-mauresque, ce porche continue la grande tradition kairouanaise. L’architecte du XIIIe siècle a cherché avant tout à mettre son œuvre en harmonie avec l’édifice du IXème siècle et a employé des éléments dont le vieux sanctuaire lui fournissait le modèle. Ce souci semble guider tous les intervenants postérieurs sur ce monument.
   
       
   
Internet Explorer 6.0, 1024 x 768