C’était en juillet dernier, les rebelles chiites au Yémen, les Houthistes (originaires du nord du pays), ont annoncé qu’ils s’alliaient avec l’ex-président Ali Abdallah Saleh et son parti pour former un nouveau conseil politique de 10 membres, destiné à gouverner le pays.

L’objectif de cette alliance visait à contrer l’offensive militaire menée par le voisin saoudien pour rétablir à Sanaa son protégé, le président Abd Rabbo Mansour Hadi. Mais les bombardements continus de la coalition armée, menée par Riyad, n’ont pas réussi à enrayer les avancées sur le terrain des rebelles qui contrôlent depuis 2014 la capitale Sanaa.

Le phénix qui renaît de ses cendres

Après avoir survécu à l’éloignement, aux sanctions, à la guerre civile et aux assassinats, Ali Abdallah Saleh, tel le phénix qui renaît de ses cendres, est revenu en politique en s’alliant avec ceux qu’il a longtemps combattus, les Houthistes. De religion chiite zaydite (de la même religion que les Houthistes du nord), il a une longue carrière mouvementée. En 1958, il rejoint l’armée yéménite et se bat aux côtés des Égyptiens contre les royalistes zaydites, soutenus dans les années 1960 par les Saoudiens. En 1978, il devient président du Yémen du nord, après l’assassinat de son prédécesseur, organisé par le leader communiste du Yémen du sud.

Un homme populaire

Survivant à plusieurs tentatives de coups d’État, c’est à lui que le Yémen doit la réunification des deux Yémen Nord et sud en 1990, à la suite de la chute de l’Union soviétique. Ce qui fait de lui un homme populaire.

Lorsque Saddam Hussein envahit le Koweït, le président Saleh soutient le leader irakien pour reprendre le contrôle sur les provinces perdues par le Yémen au profit de l’Arabie saoudite en 1934, au moment de la guerre entre les deux pays.

Pour punir son voisin, Riyad expulse près d’un million de travailleurs yéménites et leur famille de son territoire espérant provoquer un coup d’État contre le président Saleh qui survit à cette crise. Puis, de nouveau en 1994, les Saoudiens soutiennent une guérilla marxiste du sud Yémen, dans sa tentative de regagner son indépendance. En vain. Le président Saleh devient même l’allié de George W. Bush quand il déclare vouloir lutter contre Al-Qaida.

L’alliance des anciens ennemis

En 2011, le printemps arabe qui contamine le Yémen a failli être son crépuscule. Les révolutionnaires réclament sa démission, et en juin de cette année, il est victime d’un attentat dans une mosquée qui le laisse gravement blessé. Soigné en Arabie saoudite et aux États-Unis, il est forcé de laisser sa place au vice-président Abed Rabbo Mansour Hadi, après un accord politique arrangé en 2012 par les Saoudiens qui lui garantissent en échange l’immunité à vie.

Mais il ne l’entend pas ainsi. Il sait qu’il bénéficie toujours de soutiens au sein de la garde républicaine et de l’aviation. Pour revenir dans le jeu politique, il n’hésite pas à s’allier à ses anciens ennemis, les Houthistes contre les Saoudiens. Avec cette fois l’objectif d’assurer sa succession en plaçant son fils, Ahmed Ali, âgé de 42 ans à la présidence du Yémen.