Tunisie. Migration en forte hausse vers les côtes italiennes

 Tunisie. Migration en forte hausse vers les côtes italiennes

De plus en plus de migrants mineurs non accompagnés tentent la traversée vers l’Italie.

Près d’un millier de migrants Tunisiens ont atteint les côtes italiennes au cours de la première quinzaine du mois de juin en cours, contre 596 au mois de mai dernier. Une hausse substantielle recensée par le Forum tunisien pour les droits économiques et sociaux (FTDES), la veille d’une visite officielle du président Kais Saïed en Italie.

Lors d’une conférence de presse tenue en ligne aujourd’hui mercredi 16 juin, le porte-parole du FTDES Romdhane Ben Amor a indiqué que le rapport mensuel de l’ONG sur la migration irrégulière du mois de mai révèle que la Tunisie enregistre une véritable « nouvelle vague de migration ». Il indique qu’environ deux mille migrants irréguliers ont ainsi atteint les côtes italiennes à ce jour en 2021, contre 685 sur toute l’année de 2020, et « seulement » 347 en 2019, année charnière qui avait marqué un effort de répression en la matière côté tunisien.

Mai et juin, mois propices à la « harka »

Les chiffres sont encore plus parlants si on s’en réfère au nombre de migrants interceptés : durant le seul mois de mai 2021, ce sont pas moins de 2487 personnes qui ont été interceptées, soit plus que l’ensemble de l’année 2020 (2366). Les 303 opérations d’interception en 2021 en mer représentent en outre une hausse de 158% par rapport au 5 premiers mois de 2020, mais surtout 388% par rapport à la même période en 2019. En tout, 5514 ont été interceptées en 2021 jusqu’au mois de mai, soit 500 % par rapport à 2019, un record qui en dit long sur le taux de remplissage de ces embarcations.

Les effets dévastateurs des confinements à répétition sur le tissu économique tunisien ont sans doute contribué à cette augmentation exponentielle, si bien qu’un feuilleton ramadanesque intitulé « Harka », dédié à ce phénomène de société, a recueilli cette année les plus forts taux d’audience.

Parmi les migrants arrivés sur les côtes italiennes depuis le début de l’année jusqu’au mois de mai 2021, 1588 hommes, 50 femmes, 21 mineurs accompagnés et 322 mineurs non accompagnés.

La même source fait état de 52 traversées interceptées au cours des 15 premiers jours du mois de juin contre 95 opérations en mai dernier et 62 sur toute l’année 2019.

Par ailleurs, 39,14% du nombre total d’arrivées en Italie depuis le début de l’année 2021 sont des Tunisiens contre 60,86% de nationalités différentes. Le faible nombre de familles et de femmes arrivées sur les côtes italiennes s’explique selon Ben Amor par les facteurs climatiques non-appropriés.

 

Insuffisance des efforts d’interception

Les traversées interceptées sont quant à elles encore majoritairement concentrées dans la région de Sfax, atteignant 44,21% en Mai 2021, suivie de Mahdia avec 13,68% puis de Médenine avec 9,45%.

« Il est clair que le système de trafic de migrants dans la région de Sfax fonctionne de manière prospère puisque le travail des sécuritaires serait concentré uniquement sur l’interception, sans efforts de démantèlement de ces réseaux de passeurs », déplore le FTDES.

Les opérations d’interception continuent d’être basées sur l’effort de renseignement et la surveillance intensive aux entrées des villes et villages côtiers. Ainsi, le pourcentage des opérations d’interception avant d’atteindre la plage de départ est de 68,4% durant le mois de Mai 2021, lit-on de même source.

Depuis le début de l’année, le nombre de victimes ou de disparus suite à une opération de migration irrégulière est porté à 215 dont 81 en mai dernier.

Visant à lutter contre ces formes de migration, l’« International Centre for Migration Policy Development » (ICMPD) est un projet est réalisé en collaboration avec le ministère italien des Affaires intérieures. Il s’est doté d’un fonds de 55 millions d’euros dont 24,5 millions d’euros destinés à la Tunisie. Le projet fournit un appui en équipement dont les garde-côtes tunisiens sont les principaux bénéficiaires.

>> Lire aussi : L’Observatoire africain des migrations, “un événement historique”

Seif Soudani