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« Paroles de lecteurs » - Les dégâts causés par l’infidélité ne doivent pas être sous-estimés

« Je crois qu’il faut mettre les mots sur ce que vous proposez dans votre article : trahison, égoïsme, violence », écrit F.C. en réaction à une chronique de Maïa Mazaurette publiée le 2 mai dans « Le Monde », dans laquelle la journaliste suggérait de « prendre des permissions avec la monogamie » pour raviver le désir.

Publié le 14 mai 2021 à 10h36, modifié le 20 mai 2021 à 11h54 Temps de Lecture 3 min.

Je suis très en colère, je vais essayer de garder un ton neutre pour rédiger ce message. Mais, par souci d’honnêteté, je dois le dire : j’ai 39 ans, quatre enfants, et ma conjointe m’a quitté après une infidélité émotionnelle avec un homme avec qui elle dansait très régulièrement. C’était il y a deux ans.

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J’avais vécu une vie assez protégée, cela a donc été la pire crise que j’ai eue à vivre de mon existence. Je suis passé par un syndrome dépressif réactionnel, idées suicidaires, traitement antidépresseur... J’ai pu m’en sortir grâce à un incroyable support de ma famille, d’amis, de collègues, de professionnels et d’autres papas du monde entier que j’ai pu rencontrer grâce à internet et qui sont passés par la même tragédie que moi.

J’ai aussi été sauvé par la découverte du site internet www.chumplady.com et par l’ouvrage rédigé par son autrice, Tracy Shorn, Leave a cheater, gain a life. Je ne dis pas que mon ex a eu tort de me quitter, je ne sais pas. J’ai été très en colère contre elle, évidemment, mais le temps est passé, et nous avons aujourd’hui des relations fonctionnelles, bien que froides.

Je crois qu’il faut mettre les mots sur ce que vous proposez dans votre article : trahison, égoïsme, violence. Je n’ai personnellement rien contre la liberté sexuelle dans un couple, je ne me permettrais pas de juger ce qui relève du consentement mutuel et de la liberté privée de deux adultes. Mais l’infidélité cachée, c’est la trahison, le mensonge. C’est jouer avec la confiance qu’une autre personne a placée en soi. C’est prendre le risque de faire subir des blessures psychologiques terribles à la personne qui en est victime. Celle-ci pourra en perdre toute estime de soi, ramper aux pieds de son ou sa conjointe pour sauver ce qu’elle croit encore pouvoir l’être.

Je ne m’étends pas ; toujours est-il que ces blessures sont terribles, profondes, et très difficiles à guérir. En anglais, on appelle ça emotional abuse. Je ne trouve pas de parfaite traduction en français… Violence émotionnelle ? En tout cas, c’est très réel. Il faut voir ce que cela fait de perdre dix kilos en six semaines. De perdre le sommeil. De pleurer à son travail après avoir fermé son bureau à clef (quand on a la chance d’avoir un bureau). De pleurer dans son garage. De pleurer devant ses enfants. D’attendre de savoir, le soir, si son ou sa conjointe va rentrer.

Quant à la liberté sexuelle dans le couple, là aussi, il faut être lucide. S’il s’agit d’un accord clair, équilibré, résultat d’un véritable consentement mutuel, alors je n’ai vraiment rien à dire là-dessus. S’il s’agit d’une décision imposée par un conjoint car l’autre se sent prêt à tout accepter pour sauver son couple, sa famille, ses rêves, son projet de vie, alors il n’y a pas de consentement mutuel. C’est imposé.

C’est d’ailleurs horrible d’être placé devant ce type de choix (je l’ai vécu personnellement). La question est simple : « Tu veux que je te quitte ? » Comment répondre oui quand on est amoureux ? Et alors, on endosse le choix de son conjoint ou partenaire, on s’ôte même la possibilité d’être en colère contre lui ou elle, on se trouve associé par défaut à ce comportement…

Esther Perel est tristement connue pour ses éloges de l’infidélité, la caractérisant poétiquement comme une espèce d’élan de liberté pour échapper, temporairement, à l’esclavage supposé d’une vie quotidienne triste et morne. Je ne vais pas me plier à l’exercice de commenter ses positions, car je le ferai mal ; ça a été mieux fait par d’autres. Mais vous, vous êtes journaliste, n’est-ce pas ? Alors citez Esther Perel si vous voulez, mais citez également d’autres points de vue. Un bon point de départ : https://www.chumplady.com/2019/02/esther-perel-can-bite-me/

Voilà. J’espère que vous saurez voir plus loin dans mon message que la colère qui, certainement, exsude de mes phrases ; j’espère que vous saurez voir plus loin que le conjoint et père trahi et irrémédiablement blessé. Encore une fois, je ne dis pas que ma conjointe a eu tort de me quitter. Mais elle m’a aussi trahi, et en plus, elle m’a fait porter la responsabilité de cette trahison, et je l’ai, momentanément, accepté. C’est horrible à vivre. Ce que j’ai vécu est un schéma d’un classique désespérant. Les dégâts causés ne peuvent être sous-estimés. Esther Perel élève l’éloge de l’égoïsme en système. Mais dans un couple, on n’est pas seul.

F. C.

Le Monde

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