Covid-19 : que sait-on du variant new-yorkais ?

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Identifié pour la première fois dans la ville de New York en novembre 2020, le variant B.1.526 a vu sa prévalence augmenter fortement depuis le début de l’année. La proportion de ce nouveau lignage viral est ainsi passée de 3 % à la mi-janvier 2021 à 34 % fin février. Au 5 avril 2021, l’analyse par deux grands laboratoires d’un échantillon représentatif de patients new-yorkais atteints de Covid-19 a révélé que 40% de tous les virus séquencés correspondait à des variants B.1.526

Il existe deux sous-populations au sein du lignage B.1.526, selon que le virus renferme ou non la mutation E484K. Environ la moitié des variants B.1.526 sont porteurs de cette mutation, dont on sait qu’elle est associée in vitro à une diminution de la neutralisation des anticorps et donc à un possible échappement immunitaire. Cette mutation E484K est également retrouvée dans les variants préoccupants identifiés en Afrique du Sud (B.1.351) et au Brésil (P.1). Ce variant new-yorkais renferme une seconde mutation préoccupante, N501Y*. Associée à une transmissibilité accrue, elle est présente dans les variants anglais B.1.1.7, sud-africain B.1.351 et brésilien P.1.

Les variants new-yorkais qui ne renferment pas la mutation E484K renferment la mutation S477N qui, elle, n’a pas d’impact sur la capacité de neutralisation des anticorps. Ces virus B.1.526-S477N constituent donc un sous-lignage distinct au sein des variants B.1.526. 

Le département de santé publique a réceptionné des prélèvements provenant de résidents de la ville de New York. Les caractéristiques démographiques et cliniques des personnes infectées par les variants new-yorkais B1.526 et anglais B.1.1.7 ont été comparées.

Les épidémiologistes du New York City Department of Health and Mental Hygiene ont également cherché à déterminer si le variant new-yorkais était ou non responsable de réinfections, voire d’infections survenant chez des personnes ayant été partiellement ou complètement vaccinées. On rappelle que, par définition, une réinfection correspond à une contamination par le SARS-CoV-2, confirmée par séquençage génomique, survenue après un délai d’au moins 90 jours après un dernier test PCR ou antigénique positif. Une infection est qualifiée de post-vaccinale lorsqu’un individu est trouvé positif à un test PCR ou antigénique réalisé sur un prélèvement respiratoire effectué au moins 14 jours après l’injection de la seconde dose de vaccin.

L’étude des épidémiologistes new-yorkais, publiée le 5 mai 2021 dans le bulletin hebdomadaire des Centres de contrôle et de prévention des maladies (CDC), révèle que 56 % des variants B.1.526 renferment la mutation E484K.

Le 5 avril, les variants B.1.526 porteurs de la mutation E484K représentaient 25 % de tous les virus SARS-CoV-2 séquencés, contre 16 % pour les variants B.1.526 non porteurs de la mutation E484K. Quant à la proportion du variant anglais B.1.1.7, elle a récemment augmenté, atteignant aujourd’hui 36 % des prélèvements analysés.

Les 3679 patients infectés par le variant new-yorkais avaient entre 23 et 50 ans (âge médian : 35 ans). Comparés aux patients dont l’infection n’était pas associée à un « variant préoccupant » ou un « variant d’intérêt », ceux infectés par le variant B.1.526 vivaient préférentiellement dans le Bronx ou dans des quartiers ayant un taux de pauvreté élevé ou très élevé, ou appartenaient à la communauté noire.

Parmi les patients infectés par le variant B.1.526, environ 71% étaient symptomatiques, 4 % ont été hospitalisés, et 0,5 % sont décédés. Ces différents taux ne diffèrent pas de ceux observés dans la population des patients n’ayant pas été infectés par des variants préoccupants ou d’intérêt. En revanche, le taux d’hospitalisation parmi les patients infectés par le variant anglais B.1.1.7 était plus élevé (5,8 %).

Pourcentage de prélèvements contenant le variant new-yorkais B1.526 (porteur ou non de la mutation E484K), le variant anglais B.1.1.7 et d’autres variants préoccupants ou d’intérêt (New York, 1er janvier au 5 avril 2021). Thompson CN, et al. Morb Mortal Wkly Rep. 5 May 2021.

Un variant non associé à une maladie plus sévère

Ces résultats préliminaires indiquent cependant que le variant B.1.526 ne provoque pas une maladie Covid-19 plus sévère. En outre, le taux de réinfection, parmi les patients infectés par le virus B.1.526 porteurs de la mutation E484K, est globalement faible, de l’ordre de 0,5%. On manque de recul pour estimer l’éventuel risque de contamination par ce variant B.1.526E484K chez des personnes vaccinées. En effet, la population au sein de laquelle on observe la plus forte prévalence d’infection par le virus B.1.526 est celle qui est le moins vaccinée, ce qui limite la possibilité d’évaluer la survenue d’infections post-vaccinales.

Pays dans lesquels le variant new-yorkais B.1.526 (porteur de la mutation E484K dans la protéine spike) a été identifié. © Outbreak.info

Une autre étude, conduite par des chercheurs de l’université Columbia de New York et publiée le 15 avril 2021 sous forme de preprint sur le site medRxiv, indique que le variant B.1.526E484K est partiellement ou complètement résistant à deux anticorps monoclonaux utilisés en thérapeutique. Il est en outre quatre fois moins sensible à la neutralisation par des anticorps présents dans le plasma de patients Covid-19 convalescents et environ 3,5 fois moins sensible aux anticorps sériques induits par la vaccination.

À ce jour, le lignage B.1.526 a diffusé dans l’ensemble des États-Unis ainsi que dans 21 pays, dont Aruba (Antilles néerlandaises), l’Équateur, Porto Rico, Saint-Martin.

Marc Gozlan (Suivez-moi sur Twitter, Facebook, LinkedIn)

*  Les mutations E484K et S477N se situent, au sein de la protéine spike, dans le domaine de liaison du récepteur (RBD) avec le récepteur cellulaire ACE2. Trois mutations, responsables de changements d’acides aminés, sont caractéristiques de la lignée B.1.526 : L5F, T95I, D253G. Des sous-lignées possèdent des modifications supplémentaires : S477N, E484K, A701V et Q957R.

Pour en savoir plus :

Thompson CN, Hughes S, Ngai S, et al. Rapid Emergence and Epidemiologic Characteristics of the SARS-CoV-2 B.1.526 Variant — New York City, New York, January 1–April 5, 2021. MMWR Morb Mortal Wkly Rep. ePub: 5 May 2021. doi: 10.15585/mmwr.mm7019e1

Annavajhala MK, Mohri H, Wang P, et al. A Novel and Expanding SARS-CoV-2 Variant, B.1.526, Identified in New York. medRxiv. Posted April 15, 2021. doi: 10.1101/2021.02.23.21252259

Lasek-Nesselquist E, Lapierre P, Schneider E, et al. The localized rise of a B.1.526 SARS-CoV-2 variant containing an E484K mutation in New York State. medRxiv. Posted online March 1, 2021]. doi: 0.1101/2021.02.26.21251868

Annavajhala MK, Mohri H, Zucker JE, et al. A novel SARS-CoV-2 variant of concern, B.1.526, identified in New York. medRxiv. Posted online February 25, 2021. doi: 10.1101/2021.02.23.21252259

West AP, Barnes CO, Yang Z, Bjorkman PJ. SARS-CoV-2 lineage B.1.526 emerging in the New York region detected by software utility created to query the spike mutation landscape. bioRxiv. Posted online February 23, 2021. doi: 10.1101/2021.02.14.431043

Sur le web :

B.1.526 Lineage with S:E484K Report (Outbreak.info)

3 réponses sur “Covid-19 : que sait-on du variant new-yorkais ?”

  1. Merci pour cet article simple et explicite sur ce qu’est et ce qu’induit une mutation sur le génome viral.
    Ni hystérique, ni complotiste, ni alarmiste : factuel, scientifique.

  2. Voilà un article factuel qui laisse le lecteur libre de tirer sa conclusion.

    Merci

  3. Un article dans la droite ligne de toutes le publications de Marc Gozlan. Pédagogie, souci de l’exposé, richesse des sources.

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