Il y a les chiffres qui, deux mois plus tard, donnent encore le tournis : 38 morts et un disparu, quelque 224 000 bâtiments touchés ou détruits, 2 600 entreprises en difficulté, 12 000 véhicules bons pour la casse, 155 000 tonnes de déchets collectés, etc. Et puis, il y a les innombrables récits des drames humains, petits ou grands. Dont celui de Giulio Gobatto, qui raconte avec calme et dépit les terribles journées des 14 et 15 juillet.
Cet ancien camionneur d’origine sicilienne vit à Pepinster, l’une des communes les plus durement atteintes par les pluies diluviennes qui ont déferlé, causant des dégâts dans 209 des 262 communes de Wallonie. La Vesdre et son affluent, la Hoëgne, ont débordé. Devant la petite maison de Giulio Gobatto, le cours d’eau a atteint 6 mètres. Il a tout emporté, dont la station-service, fait s’effondrer des bâtiments, tué une vieille dame dont le corps allait être retrouvé à Trooz, 13 kilomètres en aval. Cinq autres victimes ont été recensées dans cette municipalité de 9 800 habitants. Plus de la moitié d’entre eux ont été affectés par les inondations, beaucoup ont tout perdu, une quarantaine de maisons devront être démolies.
« Mes meubles, ma belle cuisine, tout est parti, raconte Giulio Gobatto. J’avais 1,5 mètre d’eau dans l’entrée mais le plus effrayant, c’était le bruit. Comme celui d’un immense torrent. Et puis il y a eu les odeurs, d’hydrocarbure, de gaz, de détritus. On a eu longtemps des maux de tête », explique-t-il avec son accent rocailleux.
Plus loin, dans la rue Neuve, portes et fenêtres du Pot de Beurre sont ouvertes et laissent entrevoir une salle dévastée. Le restaurant d’Hervé Bogaert, entré au Guide Michelin grâce à son « incontournable poularde aux vins de Bourgogne » ne rouvrira sans doute pas. Sur la centaine de commerces de la municipalité, moins d’une dizaine ont pu se remettre en marche. « On est des automates, notre cerveau a décroché mais ça vaut mieux, étant donné le temps qu’il va nous falloir pour se sortir de tout ça », dit Vincent Gohy qui tente, en face, de restaurer sa maison. Un autre voisin, Sullivan Plunus, évoque, lui, d’autres difficultés. Comme celle de ce client, propriétaire d’une maison qui est jugée encore habitable et suffisamment stable, contrairement à toutes les autres de la rue. S’il veut la quitter et la démolir, ce sera à ses frais, même s’il a perdu tout ce qu’elle contenait.
« Les gens sont un peu désespérés »
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