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Exposition : Najah Albukai, le Goya de l’horreur syrienne

L’artiste, réfugié en France en 2015, présente, à la galerie Fait & Cause, à Paris, dessins et gravures qui décrivent l’ordinaire de la prison dans son pays.

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Publié le 29 mars 2021 à 09h00, modifié le 04 juin 2021 à 11h33

Temps de Lecture 4 min.

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« Prier », de Najah Albukai, dessiné en 2015 et gravé en 2019.

On pense tout de suite à Goya et à Zoran Music, aux gravures des Désastres de la guerre et à celles de Nous ne sommes pas les derniers. Les sujets sont les mêmes : cruauté, inhumanité, horreur. Goya les avait observées en Espagne durant la guerre contre l’occupation napoléonienne et Music à Dachau, où il fut déporté. Najah Albukai les a subies à Damas, dans le centre de détention 227, où les hommes de Bachar Al-Assad torturent et assassinent ceux qui s’opposent au dictateur syrien. Après une première détention en 2012, Albukai est repris en 2014 pour avoir tenté de fuir le pays et détenu trois mois avant que sa famille réussisse à acheter sa libération et son passage au Liban. A Beyrouth, il dessine d’abord ce qu’il a en mémoire puis, réfugié en France en 2015, en fait des eaux-fortes.

Lire l’enquête (en mars 2019) : Article réservé à nos abonnés Après la guerre, l’impossible parole des exilés syriens

Exposés ensemble – l’artiste avait déjà été présenté en mars à la galerie Depardieu à Nice –, ses dix-sept dessins et vingt-huit gravures décrivent l’ordinaire de la prison : des cadavres squelettiques portés dans un drap par quatre moribonds décharnés qui en tiennent chacun l’un des quatre angles, les mêmes spectres à peine vêtus assis contre les murs ou allongés sur le ciment, d’autres attachés par les poignets à un câble tendu ou ligotés, les mains dans le dos, pour être battus plus commodément et, quelquefois, les bourreaux qui font l’appel ou lèvent leur bâton.

Quand il en parle, Albukai est très précis. Ainsi explique-t-il d’abord les conditions techniques de sa vision. « Pendant la première incarcération, j’étais dans un sous-sol du centre 227, sans lumière. Je voyais à peine les silhouettes. La deuxième, c’était dans une cellule au rez-de-chaussée, avec de la lumière. Ce sont les scènes de cet emprisonnement-là que j’ai mémorisées et dessinées après ma sortie, au stylo à bille, sur toutes sortes de papiers, des revers d’affiches, etc. Sur place, c’était impossible et beaucoup trop dangereux. Si j’avais été pris avec des dessins, c’était fini. » Une scène lui revenait de manière obsessionnelle, l’enlèvement d’un cadavre par les prisonniers. « Je l’ai dessinée des dizaines de fois. » On comprend qu’il a été l’un de ces hommes forcés de transporter les corps.

Un dessinateur-né

Il est aussi minutieux dans la description de l’endroit. Chaque détenu avait une surface au sol d’à peu près 2 mètres de long et 70 centimètres de large, des dizaines d’hommes de tous âges les uns contre les autres. « Il n’y avait rien à faire. Juste attendre les repas, pommes de terre et olives, et les séances de coups. » Les pires bourreaux, dit-il, étaient les soldats qui avaient été eux-mêmes internés pour n’avoir pas respecté la hiérarchie militaire et faisaient du zèle pour démontrer leur dévotion au régime.

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