L’AVIS DU « MONDE » – À VOIR
Dans la steppe de Mongolie, Amra (Bat-Ireedui Batmunkh), 12 ans, va à l’école et se prépare aux sélections d’un concours de chant télévisé qui, s’il le remporte, le mènerait à la capitale, Oulan Bator, et lui apporterait la notoriété. Car, à la maison, on ne roule pas sur l’or. Zaya (Enerel Tumen), sa mère, s’occupe du troupeau de chèvres et de la fabrication des fromages. Son père, Erdene (Yalalt Namsrai), mécanicien de métier, est le dernier des nomades à s’opposer aux sociétés minières qui polluent l’environnement et chassent les habitants de leurs terres.
La vie cependant est heureuse, pleine d’une grâce ancestrale. C’est à peine si la présence (saugrenue) des téléphones portables retient notre attention tant, alentour, les paysages sont immenses et leur beauté saisissante. Immobiles et immuables, ils donnent le pouls lent au film.
Jours qui passent
L’accident ne prévient pas. Il survient lors d’un retour en voiture de l’école. La voiture renversée en un tour de volant, dans un nuage de poussière, tuant sur le coup Erdene tandis que, sur le siège passager, Amra survit. Sain et sauf si ce n’est que son enfance s’est envolée, et avec elle les rêves de célébrité. Le jeune garçon croit pouvoir devenir grand, en un jour. Un petit homme qui ne baisse pas les bras, déterminé à poursuivre le combat de son père et de subvenir, désormais, aux besoins de sa mère et de sa petite sœur. L’histoire bat d’un autre rythme, change de tonalité, les rires et les chants se taisent.
L’histoire bat d’un autre rythme, change de tonalité, les rires et les chants se taisent
Après L’Histoire du chameau qui pleure (2003), Le Chien jaune de Mongolie (2005) et Les Deux Chevaux de Gengis Khan (2009), tous primés de nombreuses fois, Byambasuren Davaa remet son ouvrage sur le métier, poussant son exploration de la Mongolie à travers un autre regard d’enfant, une autre famille, tout aussi attachante que les précédentes.
Nouvelle variation sur les jours qui passent, suspendus à une yourte et à la bonne conduite d’un troupeau alors que menace l’expansion du monde moderne, le long-métrage Les Racines du monde se place à hauteur d’enfant, pour saisir, en un seul geste, l’immensité de la terre et sa fragilité. Le film embrasse l’infiniment petit et l’infiniment grand, allie sensibilité et beauté, crée des vibrations aux minuscules nuances dont la somme finit par ranimer les battements du cœur.
Film allemand et mongol de Byambasuren Davaa. Avec Bat-Ireedui Batmunkh, Enerel Tumen, Yalalt Namsrai (1 h 37). www.lesfilmsdupreau.com/prog.php?code=rdm