Eli Broad portait bien son nom. Son patronyme, qui signifie « large » en anglais, s’étale, en effet, partout dans Los Angeles : au Museum of Contemporary Art (MOCA), dont il fut le cofondateur et, longtemps, un des principaux donateurs, au Los Angeles County Museum of Art (LACMA) aussi, qui compte en son sein le Broad Contemporary Art Museum, et à l’université UCLA, dotée depuis 2006 d’un Broad Art Center. Sans oublier son musée privé, simplement baptisé « The Broad », ouvert en 2015.
Durant cinq décennies, le cofondateur du groupe immobilier Kaufman & Broad a fait la pluie et le beau temps sur la scène artistique de Los Angeles, avec une fortune estimée par le magazine Forbes à 6,9 milliards de dollars (environ 5,7 milliards d’euros). Le collectionneur et mécène américain est mort le 30 avril dans sa ville de cœur à l’âge de 87 ans.
Né à New York le 6 juin 1933, Eli Broad fut un bâtisseur, dans tous les sens du terme, incarnation du rêve américain. S’arrachant à son destin, ce fils unique d’un père immigrant lituanien, peintre en bâtiment, et d’une mère couturière, était devenu, avant ses 30 ans, l’un des plus grands promoteurs du pays, spécialiste de l’immobilier résidentiel.
« Je n’aime pas les statu quo »
Diplômé en comptabilité de l’université de Michigan, il rencontre à Detroit Donald Kaufman, avec lequel il lance en 1957 Kaufman & Broad, qui développe un standard de maisons individuelles bon marché mais de qualité, conçu pour les primo-acquérants. Très vite, c’est le succès. En 1963, le jeune millionnaire déménage la société à Los Angeles. En tension perpétuelle, Eli Broad monte un empire de services financiers en achetant notamment la compagnie d’assurances Sun Life, qu’il revendra en 1998 pour près de 18 milliards de dollars.
Découvrant l’art avec sa femme Edythe, Eli Broad s’impose rapidement dans le monde comme un très grand collectionneur. Le couple achète sa première œuvre en 1972, un dessin de Van Gogh pour 95 000 dollars, puis Henri Matisse, Amedeo Modigliani et Joan Miro, avant de bifurquer vers le Pop Art, Roy Lichtenstein, Robert Rauschenberg, Jasper Johns. C’est surtout l’art américain de son temps qu’il accompagnera en collectionnant Cy Twombly, Cindy Sherman, dont il possède une centaine de photos, Jeff Koons ou Jean-Michel Basquiat. En quarante ans, il monte une collection pléthorique de plus de 2 000 œuvres de 200 artistes, tous devenus de grandes figures du marché.
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