Le tribunal correctionnel de Paris a condamné, le 8 juin, à des peines de prison ferme quatre personnes impliquées dans la "reprise frauduleuse" de l'usine Samsonite d'Hénin-Beaumont (Pas-de-Calais). Les prévenus étaient accusés d'avoir détourné des actifs de l'entreprise, provoquant du même coup sa mise en liquidation, en 2007, et le licenciement des quelque 205 salariés.
Confronté à une baisse importante des commandes, le fabricant américain de bagages Samsonite avait décidé, à la mi-2005, de vendre son usine d'Hénin-Beaumont à HB Group. Prenant ensuite le nom d'Energy Plast, cette société devait redresser le site en développant des bagages no name (c'est-à-dire vierges de toute marque) puis en se lançant dans la production d'énergie photovoltaïque.
Mais le business plan, fondé sur des prévisions "extrêmement irréalistes" selon le jugement du tribunal correctionnel, ne s'est jamais concrétisé. Pis : en un an, la trésorerie d'Energy Plast a été ponctionnée de près de 2,58 millions d'euros pour des "prélèvements injustifiés". Un million d'euros a été versé à une firme elle-même contrôlée par une société immatriculée aux Iles Vierges britanniques. Pour le tribunal correctionnel, ces paiements ont "amplifié (...) la fragilisation de la reprise".
Parmi les condamnés, le dirigeant d'Energy Plast, Jean-Jacques Aurel, a écopé de trois ans de prison, dont deux avec sursis. Pour le secrétaire général de l'entreprise, Jean-Michel Goulletquer, la peine est encore plus lourde : deux ans ferme. Cet ancien administrateur judiciaire "avait dû démissionner de ses fonctions à la suite de malversations" qui lui avaient valu d'être condamné, en septembre 2001, à un an de prison avec sursis, d'après le tribunal. Les deux hommes sont par ailleurs soumis à une "interdiction de gérer" de cinq ans et devront payer, avec un autre prévenu lui aussi condamné, près de 2,58 millions d'euros à titre de dommages et intérêts.
"DÉFAISANCE SOCIALE"
Dans cette affaire, les anciens salariés de Samsonite et leur avocat, Me Fiodor Rilov, considèrent que le fabricant de bagages a cédé son usine pour se défausser des coûts liés à la fermeture. "C'est une opération de défaisance sociale", affirme Me Rilov, en rappelant que les indemnités de licenciement ont été réglées par la collectivité, via l'Association pour la gestion du régime de garantie des créances des salariés (AGS). Le tribunal de grande instance de Béthune a d'ailleurs annulé la vente, en 2008.
Samsonite a fait appel mais la date de l'audience n'a pas encore été fixée. Le conseil des prud'hommes de Lens a, par ailleurs, condamné Samsonite à verser à ses anciens salariés des dommages et intérêts.
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