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Le gouvernement privatise Arianespace

Airbus Safran Launchers (ASL) va prendre le contrôle du leader mondial des lanceurs de satellites.

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Publié le 10 juin 2015 à 09h48, modifié le 10 juin 2015 à 15h45

Temps de Lecture 4 min.

La privatisation d'Arianespace conclut un processus mené au pas de course par les Européens pour contrer l’offensive de l’américain SpaceX.

Changement d’orbite pour Arianespace. La prise de contrôle du leader mondial des lanceurs de satellites par Airbus Safran Launchers (ASL) a été confirmée mercredi 10 juin lors d’une réunion interministérielle sous la houlette de Matignon. Le premier ministre, Manuel Valls a indiqué que la société chargée de commercialiser et d’assurer les lancements des fusées Ariane, Soyouz et Vega sur le site de Kourou (Guyane), avait « vocation à être contrôlée par la coentreprise Airbus Safran Launchers, via la cession des titres Arianespace détenus actuellement par le CNES », selon un communiqué publié par Matignon, mercredi après-midi. L’annonce officielle est elle prévue à l’ouverture du Salon du Bourget, lundi 15 juin.

ASL reprendra les 34 % détenus par le Centre national d’études spatiales (CNES), jusqu’alors premier actionnaire et possédera 75 % du capital de . La transaction est estimée entre 100 et 200 millions d’euros selon Les Echos.

Il aura fallu cependant plusieurs mois de discussions entre l’Agence des participations de l’Etat (APE) et les deux industriels pour trouver un accord. D’autant qu’au départ, il était même envisagé une valorisation négative. La hausse du dollar face à l’euro a été déterminante en permettant de relever l’appréciation. L’accord n’a ensuite été possible qu’avec l’engagement de maintenir l’emploi chez Arianespace.

Recomposition de l’industrie spatiale

Ce passage du public au privé intervient un an après l’annonce sur le perron de l’Elysée de la recomposition de l’industrie spatiale. Il conclut un processus mené au pas de course par les Européens pour contrer l’offensive de l’américain SpaceX.

Tout a commencé en décembre 2013, quand la fusée américaine Falcon est parvenue à mettre en orbite un satellite de télécommunications. Ce succès résonna alors comme un coup de tonnerre dans le ciel spatial. Non seulement Elon Musk, le fondateur de SpaceX, avait réussi à ébranler le duopole européano-russe Ariane - Proton en partant de rien. Mais il cassait les prix en proposant des tarifs de lancements 30 % moins chers que ses concurrents, les ramenant à 60 millions de dollars (52,7 millions d’euros). Son secret, une production unifiée sur un seul site où la tôle entre d’un côté pour sortir en fusée de l’autre. Son atout, la confiance de la Nasa qui n’hésite pas à lui passer des contrats de lancement et à les financer.

En jouant sur les prix, le nouvel acteur américain a aussi bouleversé les règles du jeu. Plus question d’avancer la fiabilité des lancements d’Ariane pour défendre des tarifs élevés Désormais, les tirs doivent être peu chers et compétitifs. Il faut donc gagner en efficacité et rationaliser la filière industrielle très disséminée en Europe.

Changement de paradigme

Ce changement de paradigme provoqua alors des turbulences dans le monde spatial européen, révélant les différends entre chacun, comme si la perte de repères avait désarçonné tous les acteurs. Les agences française, européenne et allemande chargées de concevoir les fusées Ariane n’étaient pas forcément d’accord entre elles et les industriels ne se retrouvaient plus dans leurs propositions. Même les clients que sont les opérateurs de satellites s’en mêlaient pour évoquer leur préférence en matière de lanceur…

Dans ce brouhaha général, Airbus et Safran ont créé la surprise au printemps 2014. Ensemble, ils proposent un projet de fusée Ariane 6 « non sollicité » pour se substituer au lanceur décidé par l’agence spatiale européenne (ESA) et le CNES. Pour eux, la configuration voulue par ces agences pour le successeur d’Ariane 5 n’est pas adaptée à la nouvelle concurrence. Les deux industriels esquissent une nouvelle version moins chère et plus compétitive, capable de concurrencer les fusées de SpaceX. Ils accompagnent leurs demandes d’une réorganisation industrielle en profondeur, pour réduire les coûts. Ce changement de modèle économique est indissociable du projet de fusée. Il entraîne des transferts de compétence ou de participation du public vers le privé.

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Très rapidement, en juin 2014 l’Elysée approuve le principe de cette réorganisation : aux industriels le contrôle de la filière et la prise de risque, au CNES la vision à long terme. Dans cette perspective, ASL prend en charge les maillons manquants : la conception des lanceurs, une mission dévolue aux agences depuis le début de l’aventure spatiale et les lancements effectués par Arianespace, dont le premier actionnaire était jusqu’à présent le CNES.

Premier lancement d’Ariane 6 en 2020

Depuis, Airbus et Safran ont commencé la fusion de leurs activités et harmonisé les statuts des 8 000 salariés concernés. L’objectif est d’aboutir à automne. Pour que la parité soit respectée, chacun ayant 50 % de la filiale commune (ASL), Safran a apporté 800 millions d’euros.

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La prise de contrôle d’Arianespace ne devrait pas se traduire par une intégration. L’hypothèse de transformer cette société en division commerciale a été écartée. La société restera autonome, gardera son siège à Evry et conservera ses emplois. Arianespace poursuivra le plan de compétitivité engagé pour compenser les baisses de prix nécessaires face à SpaceX. Mais cela n’empêchera pas des réorganisations notamment sur le site de Kourou. A l’automne, la nouvelle entité ASL sera opérationnelle avec pour objectif un premier lancement d’Ariane 6 en 2020.

Pendant ce temps, SpaceX pousse son avantage. Dernière avancée, son entrée sur le marché des lancements militaires américains jusqu’alors aux mains de Boeing et Lockheed.

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