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Au Japon, dix ans après le tsunami, la déferlante de béton

D’autres intérêts que la protection des populations ont pesé dans la construction des digues anti-tsunami, dont la pertinence est sujette à caution. Or leur effet négatif sur les équilibres écologiques ne fait guère de doute.

Publié le 30 mars 2021 à 16h00, modifié le 30 mars 2021 à 17h08 Temps de Lecture 4 min.

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Des cabanes de pêcheurs temporaires, à l’ombre de la digue, à Taro (préfecture d’Iwate), au Japon, le 28 février 2021.

Analyse. La catastrophe nucléaire à la centrale Daiichi, dans le département de Fukushima, au Japon, a focalisé l’attention des médias à travers le monde comme un événement pivot de l’aveuglement des Etats sur les risques du nucléaire civil et une préfiguration de ce qui pouvait arriver ailleurs.

Cette hĂ©gĂ©monie de Fukushima dans la perception du sĂ©isme suivi d’un tsunami du 11 mars 2011 contraste avec la vision japonaise d’une triple catastrophe (sĂ©isme, tsunami et accident nuclĂ©aire), baptisĂ©e « le grand dĂ©sastre du Japon de l’Est Â». Elle laisse surtout dans l’ombre d’autres effets, riches en enseignements sur le poids du secteur de la construction dans les choix politiques du gouvernement japonais mais aussi sur la manière de parer aux risques de submersion dus au dĂ©règlement climatique Ă  travers le monde.

Le bĂ©tonnage des littoraux qui a dĂ©figurĂ© les cĂ´tes Ă  rias [vallĂ©es fluviales envahies par la mer] du Tohoku (Nord-Est), modifie le rapport des habitants Ă  la mer et bouleverse les Ă©quilibres Ă©cologiques, sans pour autant garantir pleinement la protection du littoral. A la perte des ĂŞtres chers (18 500 morts et disparus), aux souvenirs, chez les survivants, de ces jours oĂą les noms de leurs hameaux sont soudain entrĂ©s dans l’histoire s’ajoute, dix ans plus tard, la destruction de ce qui restait de leur vie : un environnement familier. Au tsunami a succĂ©dĂ© une dĂ©ferlante de bĂ©ton.

Financement politique

Une muraille qui peut atteindre 14 mètres en 620 emplacements s’étend dĂ©sormais sur près de 400 km, obstruant baies et criques dans trois dĂ©partements : Fukushima (68 km de digues) ; Miyagi (239 km) et Iwate (85 km). « Pour nous, ce fut le coup de grâce Â», dit un habitant d’Ogatsu (dĂ©partement de Miyagi) oĂą 230 habitants sur 4 200 pĂ©rirent.

A la suite du dĂ©sastre, les autoritĂ©s ont renouĂ© avec l’esprit du plan de « remodelage de l’Archipel Â» du premier ministre Kakuei Tanaka (1972-1974) : arasement des montagnes pour crĂ©er des zones rĂ©sidentielles et industrielles sur un littoral bĂ©tonnĂ© sur des dizaines de kilomètres. Cette fois, les digues sont plus hautes, plus longues et plus massives que celles construites auparavant, « sans s’interroger sur leur pertinence pas plus que sur les effets contraires aux initiatives de retissage du lien entre la mer et les collines boisĂ©es des pĂŞcheurs afin de favoriser le dĂ©versement dans la mer de riches nutriments qui en proviennent Â», fait valoir RĂ©mi Scoccimarro, gĂ©ographe et maĂ®tre de confĂ©rences en langue et civilisation japonaises Ă  l’universitĂ© de Toulouse Jean-Jaurès, actuellement chercheur Ă  la Maison franco-japonaise Ă  Tokyo, et auteur de Tsunami de bĂ©ton : de l’empreinte Ă  l’emprise sur les paysages littoraux après les catastrophes du 11 mars 2011 publiĂ© en 2020 dans la revue Projets de paysage.

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