Tribune. La pandémie causée par le coronavirus constitue une catastrophe sans précédent dans l’histoire du tourisme. On peut d’ores et déjà en tirer trois leçons.
La crise a d’abord confirmé à quel point le tourisme était un fait de civilisation – un désir quasi universel – occupant une place notable, voire centrale, dans nos vies, dans nos villes, dans notre économie, dans notre rapport au monde, bien loin de la lubie consumériste, négligeable et méprisable, à laquelle certains beaux esprits réduisent cette activité. Le tourisme nous manque quand nous en sommes empêchés par la pandémie, la maladie, l’âge ou l’insuffisance de moyens financiers. Et, s’il est un domaine où l’on ne peut faire l’économie du mode présentiel, c’est bien la pratique touristique.
Cette crise aura fait des dégâts d’une ampleur considérable, qui affecteront durablement des pans entiers de l’économie, partout dans le monde : il y aura là des occasions de repartir sur des bases différentes.
Le monde entier s’y est converti
Cette exigence de refondation n’est pas seulement le fruit de la crise actuelle, qui n’a fait qu’amplifier une nécessité déjà patente depuis des années. Jusqu’en 2019, les excès de toutes sortes avaient, en partie au moins, été dissimulés par une croissance ininterrompue : saturation de territoires qui, à l’instar des Baléares, estimaient déjà qu’ils devenaient trop dépendants d’une activité touristique dont le rendement décroissait ; lassitude des habitants de nombreux lieux, qui voyaient les touristes bouleverser des parts de plus en plus importantes de leur univers quotidien ; saturation, enfin, de la planète, menacée par le réchauffement climatique et l’emprise croissante des hommes sur des écosystèmes fragiles.
Tout cela est le produit d’un système insuffisamment régulé, tourné vers un irraisonné et irresponsable « toujours plus », même s’il était de plus en plus maquillé sous les habits souvent trompeurs d’un « tourisme durable ».
Mais vouloir réinventer le tourisme ne veut pas dire en ignorer les réalités mondiales : changer de lieu pour son plaisir, dans le cadre de son temps libre, n’est plus l’apanage d’une minorité fortunée de la population. Le monde entier s’y est converti ; dans les pays en développement, l’accès aux pratiques touristiques est l’un des critères de l’élévation du niveau de vie ; c’est ainsi qu’il y a désormais plus de touristes chinois et indiens que de touristes européens et états-uniens.
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