Chronique. Qu’elle est verte, ma révolution ! Emportés par un enthousiasme désarmant, certains écologistes se persuadent que la transition environnementale est un long fleuve presque tranquille qui ne rencontrerait qu’un obstacle de taille : l’absence de courage d’une partie des dirigeants politiques et des chefs d’entreprise, accrochés au vieux monde fossile et productiviste. Un peu simple ! Ils sous-estiment les fortes contradictions et les externalités négatives inhérentes à un changement – inévitable et urgent – du modèle productif et des modes de vie.
Le coût économique du grand basculement vers un monde décarboné – angle mort du discours des politiques, surtout des Verts – reste sujet à débat. La Cour des comptes européenne l’a estimé à 1 120 milliards d’euros par an entre 2021 et 2030 pour le Vieux Continent et à 145 milliards pour la France, une évaluation jugée trop élevée par certains experts. Mais la pénalisation des émissions de C02 par les taxes ou la réglementation entraînera une perte de valeur considérable du capital et d’équipements devenus obsolètes, un « choc d’offre négatif », prévient l’économiste Jean Pisani-Ferry.
Les dommages économiques de l’inaction seraient, quant à eux, plus exorbitants, alerte un panel sans précédent de 738 économistes récemment sondés par l’Institute for Policy Integrity de l’université de New York : 1 700 milliards de dollars (1 450 milliards d’euros) par an dans les cinq prochaines années, selon la médiane de leurs projections. Et 30 000 milliards chaque année à l’horizon 2075.
Un risque bien réel
Et le coût écologique ? Ce n’est pas le moindre des paradoxes, mais il risque d’être élevé dans la phase initiale de la transition. Peut-on rejeter plus de gaz à effet de serre aujourd’hui pour en émettre moins demain ? De l’amont à l’aval de la chaîne de production, le risque est bien réel qu’un certain nombre de décisions conduise à ce scénario. Il ne répond pourtant pas à l’urgence décrétée par le Goupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) et l’Agence internationale de l’énergie (AIE).
La production des métaux rares utilisés dans les véhicules électriques et les renouvelables est si destructrice de l’environnement que les Occidentaux, parfois détenteurs de telles ressources, l’ont délocalisée, devenant dépendants de puissances désormais hostiles comme la Chine. Un minerai abondant comme le cuivre est essentiel à l’électrification de la planète, vecteur-clé de la révolution verte. Or, de plus en plus de pays producteurs prennent des mesures freinant son extraction et le rendent plus coûteux, avec les meilleures intentions du monde (réduction des pollutions et de la consommation d’eau, défense des populations locales…).
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