L’ambassadeur de France en Australie, qui avait été rappelé à Paris après l’annulation par les Australiens d’un mégacontrat de sous-marins français en marge de la création d’une alliance avec les Etats-Unis et le Royaume-Uni, va rentrer à Canberra, a annoncé, mercredi 6 octobre, le chef de la diplomatie française.
« J’ai désormais demandé à notre ambassadeur de rentrer à Canberra avec deux missions : contribuer à redéfinir les termes de notre relation avec l’Australie à l’avenir (…) et défendre fermement nos intérêts dans la mise en œuvre concrète de la décision australienne de mettre fin au programme des futurs sous-marins », a annoncé Jean-Yves Le Drian lors d’une audition à l’Assemblée nationale.
Le ministre australien des finances, Josh Frydenberg, a déclaré qu’il espérait que les des deux puissances pourraient maintenant « aller au-delà de nos récentes déceptions ». « Il est évident que [nous partageons] un certain nombre d’intérêts communs, a-t-il dit à la chaîne de télévision Channel 9. Alors, espérons que nous pourrons remettre cette relation sur les rails. »
Dénonçant une « trahison », une « duplicité » et un « mépris » de la part de ses alliés, Paris avait rappelé ses ambassadeurs en Australie et aux Etats-Unis, le 17 septembre, un geste sans précédent envers ces deux pays. Philippe Etienne est depuis rentré à Washington, le 29 septembre, à la suite d’une explication entre Joe Biden et Emmanuel Macron le 23 septembre par téléphone. M. Le Drian n’a pas précisé quand Jean-Pierre Thébault retournerait à son poste, à Canberra.
Nouvel entretien entre Macron et Biden
Par ailleurs, le chef de la diplomatie a annoncé que les présidents américain, Joe Biden, et français, Emmanuel Macron, s’entretiendront à nouveau au téléphone, à la mi-octobre. « Nos consultations approfondies se poursuivent dans la perspective d’un nouvel entretien que nos deux présidents auront mi-octobre, puis [d’]une éventuelle rencontre en Europe autour de la réunion du G20 qui se tiendra à la fin du mois d’octobre », a avancé M. Le Drian.
Alors que les annonces australienne, puis américaine et britannique, avaient déclenché la fureur de Paris, Emmanuel Macron a reçu, mardi, le secrétaire d’Etat américain, Antony Blinken. Les deux dirigeants ont eu un « long tête-à-tête » qui devait « contribuer à restaurer la confiance entre la France et les Etats-Unis », avait déclaré l’Elysée.
En effet, quasiment au même moment où l’Austalie annonçait la rupture de son contrat avec la France pour douze sous-marins à propulsion conventionnelle, les dirigeants de ce dernier pays, des Etats-Unis et du Royaume-Uni annonçaient la création d’une nouvelle alliance dans la région indo-pacifique, nommée Aukus. La France n’était pas incluse dans ce partenariat stratégique, bien que très présente dans la région.
La France « pleinement engagée » dans la zone indo-pacifique
« Il va sans dire que la remise à plat de nos coopérations bilatérales n’aura pas d’impact sur notre détermination à rester pleinement engagés dans l’Indo-Pacifique », a d’ailleurs souligné le ministre, estimant également que l’Australie faisait un « saut dans l’inconnu, en préférant aux sous-marins français des appareils à propulsion nucléaire. Il y aurait beaucoup à dire à la fois sur l’abandon de souveraineté que représente ce programme et sur le saut dans l’inconnu que constitue pour les Australiens le choix de recourir à une technologie qu’ils ne maîtrisent pas, qu’ils ne maîtriseront pas à l’avenir et qui les mettent donc entièrement à la merci des évolutions de la politique américaine », a-t-il dit.
Ils disent avoir fait le « choix de la sécurité, justifié par l’aggravation des tensions actuelles avec la Chine, au détriment de la souveraineté », a-t-il martelé. « Je souhaite à notre partenaire australien de ne pas découvrir à l’avenir qu’il aura sacrifié les deux », a lancé le chef de la diplomatie française.
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