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Dix-huit mois de négociations, un point presse et une lettre : comment Aukus a torpillé la vente de sous-marins français à l’Australie

A l’origine de la crise des « sous-marins australiens », il y a moins un contrat perdu qu’un renversement stratégique qui a donné naissance à une nouvelle alliance entre Australie, Royaume-Uni et Etats-Unis. Récit d’un long jeu de dupes dont la France a fait les frais.

Par , ,  (Londres, correspondante),  (Sydney, correspondance), et  (Washington, correspondant)

Publié le 08 octobre 2021 à 17h00, modifié le 09 octobre 2021 à 22h40

Temps de Lecture 18 min.

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Un sous-marin nucléaire d’attaque de la marine française à la base navale de Toulon, le 12 juin 2020.

L’histoire retiendra peut-être que c’est par le simple poids des mots, ou presque, qu’une alliance militaire décisive dans la tectonique des plaques géopolitiques mondiales s’est imposée, un matin de septembre 2021, par-dessus les brumes des océans Pacifique et Atlantique. Il est 21 h 38, à Washington, ce mardi 14 septembre, quand un certain nombre de journalistes américains et étrangers voient tomber dans leur boîte mail une invitation du Conseil de sécurité nationale, rattaché à la Maison Blanche, pour un « briefing » de presse par téléphone prévu pour le lendemain matin. Le thème annoncé est vague : « Background sur une initiative de sécurité nationale ».

Rien d’anormal, à ce stade. Autrefois réservés à des occasions bien particulières, les « briefs » sont devenus, sous la pression des réseaux sociaux et de l’information continue, la norme pour beaucoup de sujets internationaux. A toute heure, avec très peu de préavis, les correspondants de presse se retrouvent convoqués pour prendre note de positions politiques soupesées au millimètre, avant un temps très serré de questions-réponses. Le pur déclaratif y est roi.

C’est donc de cette manière, le mercredi 15 septembre, qu’une nouvelle alliance entre l’Australie, le Royaume-Uni et les Etats-Unis, baptisée Aukus, s’invite inopinément dans l’agenda des rédactions. La relecture du script de ce point de presse, auquel le correspondant du Monde a assisté, est éloquente. On y parle d’« annonce historique », du « plus grand pas stratégique que l’Australie ait décidé depuis des générations », mais d’aucun accord formel, d’aucune signature. Juste de l’ouverture de « discussions » durant dix-huit mois, pour fournir, à terme, à Canberra des sous-marins à propulsion nucléaire. Le fait que cela puisse percuter un autre contrat, français celui-là, visant à la fourniture par Naval Group à l’Australie de 12 sous-marins à propulsion diesel, est évacué en une ligne. « C’est à l’Australie de voir cela. (…) Ce sera arrangé dans les prochains jours », balaye le responsable américain interrogé.

Nouvelle stratégie

A Paris, à ce moment-là, on est déjà au courant, depuis peu, de la volte-face de Canberra. Certaines versions divergent. Mais, globalement, elles s’accordent sur le fait que, entre le 14 septembre au soir et le 15 au matin, Scott Morrison, le premier ministre australien, a tenté de joindre à au moins deux reprises Emmanuel Macron par téléphone, dont une fois durant le conseil de défense. En parallèle, les ministres de la défense et des affaires étrangères australiens contactent leurs homologues français pour leur annoncer la nouvelle. Seul le chef de l’Etat ne prend pas l’appel. En parallèle, une lettre arrive, le 15 septembre, à midi à l’Elysée. Elle dénonce par écrit le contrat avec Naval Group.

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