« J’ai toujours adoré cuisiner. Je ne sais pas trop d’où ça vient, car ma famille n’était pas particulièrement férue de cuisine, à l’exception d’une tante qui me gardait souvent. Mon père avait trois plats de référence : la quiche, le poulet rôti et les spaghettis bolognaise. Avec ma mère, d’origine péruvienne, c’était plus varié, elle préparait souvent des légumes, même si c’était parfois des surgelés. Personne à la maison n’était très connecté aux saisons ou à la diversité des goûts. J’étais la seule à vraiment m’intéresser à ça. J’ai commencé par les plats sucrés, je faisais des beignets de banane rôtis au miel et de la pâte à choux à 12 ans, des choses complexes qui me fascinaient…
Née à Neuilly-sur-Seine, j’ai grandi dans un appartement puis dans une maison à Courdimanche [Val-d’Oise]. Je me souviens qu’il y avait de la rhubarbe qui poussait dans le jardin et qu’un jour j’ai planté une pomme de terre… Pas grand-chose, donc. Mais j’aimais beaucoup les plantes, j’adorais aller à la cueillette aux champignons ou aux mûres.
A l’école, j’étais à peu près bonne ou moyenne en tout… Je faisais juste le nécessaire pour passer à l’étape d’après. J’ai suivi la voie du milieu, bac éco, puis BTS action commerciale. On me disait que j’étais bonne communicante, je n’ai pas cherché plus loin. J’ai un peu travaillé en tant que mannequin, j’ai fait de la danse latine, bossé dans une agence de communication, puis comme hôtesse d’accueil dans des boîtes de nuit…
J’en ai eu marre et je suis partie trois ans à Tahiti, puis revenue à Paris pour travailler dans l’immobilier. Après un burn-out, j’ai tout arrêté et repris des études en développement durable. J’ai découvert le système des AMAP (association pour le maintien d’une agriculture paysanne), notamment parce que je cherchais des bons produits à cuisiner. Finalement, c’est à travers la cuisine que je me suis reconnectée à la terre.
L’AMAP que j’ai rejointe était celle de la Ferme du Bec Hellouin [Eure], de Charles et Perrine Hervé-Gruyer, les pionniers français du maraîchage agroécologique. Ils m’ont proposé de suivre leur première formation en permaculture, j’y ai rencontré Edouard, et nous sommes allés monter la Ferme des Rufaux en 2012. C’est ainsi que je suis devenue maraîchère. J’ai compris alors que j’avais toujours tendu vers cela, sans savoir comment l’atteindre, sans rien connaître à la ruralité… Cela a été une succession de rencontres et de portes qui s’ouvrent.
Aujourd’hui, j’ai ma propre ferme en Basse-Normandie, Les Jardins d’Hayden (d’après le nom de mon fils). Depuis que je suis agricultrice, j’ai les meilleurs produits qui soient pour cuisiner. Je m’amuse à faire des sélections variétales. La diversité, les goûts et les couleurs, c’est mon truc. Et l’un de mes légumes favoris, ce sont les blettes, qui impliquent une culture simple, rapide, prolifique, sans prédateurs, intéressante pour le producteur, mais dont les consommateurs ne savent souvent pas quoi faire. Ce crumble avec plein de fromage et de graines est une manière de faire redécouvrir ce légume mal-aimé. Plaisir et succès garanti. »
Le Guide de la micro-ferme familiale, de Linda Bedouet, avec Stéphanie Maubé et Claire Mauquié, Rustica Editions, 176 p., 17,50 €.
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