Au début de l’été, les Châteaux Ausone et Cheval Blanc, deux premiers grands crus classés A de Saint-Emilion – le sommet – ont annoncé qu’ils se retiraient du classement propre à cette région réputée du Bordelais, pour ses vins comme son tourisme. Cette décision, révélée le 9 juillet par Le Point, fait du bruit et dit beaucoup de l’évolution des critères visant à hiérarchiser les 588 propriétés, petites ou grandes, prestigieuses ou pas, figurant dans une appellation recherchée d’abord pour son vin rouge.
Deux principaux classements régissent le vignoble bordelais. Celui du Médoc, sur la rive gauche de la Gironde et de la Dordogne, est immuable depuis sa création en 1855. Il comprend 61 grands crus classés – en 5 catégories – et les autres ; ce n’est pas sans soulever des questions quand un vin grimpe ou baisse en qualité.
Celui de Saint-Emilion, sur la rive droite, a été mis en place un siècle plus tard, en 1955, sur un autre modèle, et révisable tous les dix ans. Les échelons sont différents : quatre grands crus classés A, quatorze grands crus classés B, soixante grands crus classés, et le reste. Le dernier classement date de 2012 et le prochain, en cours d’élaboration, surviendra en 2022. « En 2012, 82 propriétés seulement ont été classées, car chacune est libre de participer ou pas », précise Franck Binard, le directeur du syndicat de l’appellation saint-émilion.
Toute propriété candidate doit déposer un dossier auprès du juge de paix, à savoir l’Institut national de l’origine et de la qualité (INAO), organisme public dépendant du ministère de l’agriculture. Or, même si les changements dans le règlement sont minimes, tous les classements depuis 1986 ont fait l’objet de contestations. Car l’enjeu est de taille : être classé, c’est gagner en statut, et le prix des bouteilles, mais surtout du foncier, grimpe, parfois de façon vertigineuse.
L’édition 2012 toujours contesté
L’INAO ne souhaite pas communiquer le nombre de dossiers reçus pour l’édition 2022. « Certaines propriétés préfèrent ne pas dire qu’elles sont candidates au cas où elles ne seraient pas retenues », explique Franck Binard. Toujours est-il que cette année manquent à l’appel les Châteaux Ausone et Cheval Blanc, le premier appartenant à la famille Vauthier, le second à l’homme d’affaires Bernard Arnault. La surprise est énorme quand on sait qu’il s’agit du binôme historique des « classés A » – ils y figurent depuis 1955 –, rejoints en 2012 par les châteaux Angélus et Pavie. Selon certains critiques de vins, Ausone et Cheval Blanc s’excluent car ils auraient mal pris que Pavie et Angélus les aient rejoints dans le saint des saints en 2012 – cette promotion étant, du reste, au cœur de procès toujours en cours.
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