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Frédéric Paulin : « Les bruits de bottes peuvent revenir, il ne faut pas baisser sa garde »

L’auteur d’une trilogie remarquée sur le djihadisme est partisan d’une littérature vigilante. Une vocation qui date des violences policières lors du G8 de Gênes, en 2001. Il y était, et il y revient dans « La Nuit tombée sur nos âmes ».

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Publié le 26 septembre 2021 à 12h00, modifié le 06 décembre 2021 à 09h56

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L’écrivain Frédéric Paulin, en mai 2021.

Vingt ans ont passé. Et, à l’entendre, dans un café voisin de la gare de Rennes, dérouler avec précision le récit des événements qu’il a vécus jadis et retrace aujourd’hui dans son nouveau roman, La Nuit tombée sur nos âmes, il n’a, d’évidence, rien oublié. Au matin du 18 juillet 2001, Frédéric Paulin, 28 ans, est monté à bord d’un des bus partant de Paris à destination de Gênes. Après Seattle et Göteborg, la capitale de la Ligurie s’apprêtait à accueillir, en son palais ducal, les dirigeants des plus grandes puissances de la planète pour une réunion du G8. En parallèle s’organisait un contre-sommet altermondialiste.

A l’époque, Frédéric Paulin, ex-objecteur de conscience, puis étudiant en droit après en avoir « bavé » toute sa scolarité, s’épanouissait dans un cursus de sciences politiques. Le jeune homme avait entrepris un doctorat sur les mouvements de la gauche extraparlementaire ayant traversé Mai 68 et la façon dont leurs membres s’étaient ensuite insérés professionnellement. Il comptait quelques amis parmi les trotskistes et les autonomes de Rennes. Un pied au-dedans, un pied au dehors de ce « rassemblement de chapelles disparates où il n’y a pas pire ennemi que son voisin, où on cherche toujours le flic, l’indic infiltré ». Le voyage à Gênes serait donc l’occasion de voir comment elles s’agrégeraient. « Au début, la fête promettait d’être exceptionnelle, se souvient l’écrivain de 49 ans. Il y avait 500 000 personnes, un méga concert de Manu Chao, des langues de toute l’Europe. »

En quelques heures, la fête vira au cauchemar. Un dispositif policier de presque 25 000 hommes avait été déployé, tandis que des agents en civil jouaient les provocateurs afin de décrédibiliser le mouvement. Un mois plus tôt, les néofascistes, tel Gianfranco Fini, l’ancien chef de file du Mouvement social italien (MSI), promu vice-président du conseil, étaient entrés au gouvernement, grâce à une alliance avec Silvio Berlusconi, revenu au pouvoir. Ils comptaient dans les forces de l’ordre moult sympathisants résolus à mettre au pas les gauchistes, à casser des communisti, qualifiés d’« ennemis » par « il Cavaliere » et les gradés ayant traversé les années de plomb.

Une rupture existentielle

Certes, il y eut bien des actes de vandalisme de la part des black blocs et de quelques autres. Mais le bilan humain du côté des manifestants fut, lui, désastreux : un mort et 600 blessés. « Notre seul tort, à l’époque, c’était d’être là, d’être présents, martèle Frédéric Paulin. Pour la première et unique fois, j’ai eu peur pour ma vie. » Ce fut de l’ordre de la cassure morale, d’une rupture existentielle. Les lendemains ne chantonneraient même plus. Ils cracheraient rage et impuissance. « J’ai été angoissé pendant deux ans. J’ai eu des attaques de panique, j’avais du mal à sortir de chez moi. Des toubibs m’ont filé du Xanax. Depuis quinze ans, je suis en analyse. »

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