Tâche ardue pour un député de la majorité que d’imposer un débat, dont l’exécutif ne veut pas entendre parler. D’autant plus quand il est question de la consommation de cannabis en France et que le constat final pose la nécessité de « légaliser » son usage. Et ce, surtout quand le chef de l’Etat, Emmanuel Macron, vient de déclarer la lutte contre les drogues comme « la mère des batailles » à un an de l’élection présidentielle.
Cette position dissonante est portée par la députée La République en marche (LRM) Caroline Janvier (Loiret) qui présente, mercredi 5 mai, le troisième et dernier volet de la mission d’information consacrée à « la réglementation et l’impact des différents usages du cannabis » à l’Assemblée nationale.
Après le cannabis thérapeutique et le cannabidiol (CBD), des députés de tous les groupes parlementaires se sont attaqués au sujet sensible du cannabis dit « récréatif », dont la consommation atteint des chiffres vertigineux en France avec un million de consommateurs quotidien et cinq millions de fumeurs réguliers à l’année. « On considère aujourd’hui que la voie de la légalisation avec un contrôle de l’Etat est la meilleure façon de protéger les Français », défend Mme Janvier.
« Ça ne fonctionne pas »
Les arguments ne sont pas nouveaux mais sont étayés par une centaine d’auditions menées en un peu plus d’un an et une consultation citoyenne qui a réuni 250 000 contributions, l’une des plus importantes menées à l’Assemblée nationale. « Quand on regarde les données, ce qui a été fait dans d’autres pays et les effets de nos politiques publiques en matière de lutte contre les drogues depuis cinquante ans, on voit bien que ça ne fonctionne pas », soutient la rapporteure qui dit regretter « les approches politiques et idéologiques » qui dominent encore aujourd’hui sur les drogues.
Les aveux d’impuissance des pouvoirs publics à endiguer la consommation croissante de cannabis et ses effets délétères sur la santé et la sécurité sont égrainés au fil des 300 pages de ce rapport parlementaire. Absence de politiques de prévention, saturation des systèmes judiciaires, mobilisation excessive des forces de l’ordre… Le rapporteur général de cette mission d’information, Jean-Baptiste Moreau (LRM, Creuse), et l’un des plus actifs sur le sujet côté LRM, est lui tout aussi sévère. « Le tout répressif est un échec total, estime-t-il. On n’a pas arrêté de durcir la loi, de mettre davantage de forces de l’ordre sur le trafic de drogue et, au final, nous sommes devenus les plus gros consommateurs de cannabis en Europe. Donc expliquer encore aujourd’hui qu’on va rester dans le statu quo et mobiliser davantage de forces de l’ordre, ce n’est plus possible. »
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