Il est 16 h 30, vendredi 28 mai, au tribunal correctionnel de Paris. « Monsieur Millot, voulez-vous venir à la barre ? »
Depuis trois jours, l’ancien patron de Bygmalion assiste en silence aux aveux répétés, circonstanciés, croisés, de ceux qui furent ses plus proches associés et collaborateurs : Guy Alvès, ex-coprésident du groupe, Sébastien Borivent, ex-directeur général, Franck Attal, ex-directeur général adjoint. Tous ont reconnu avoir été informés, à la mi-mars 2012, de la demande de l’équipe de campagne de Nicolas Sarkozy consistant à facturer frauduleusement à l’UMP (devenue Les Républicains) les frais de meetings du candidat afin de dissimuler le dépassement du plafond légal des dépenses de campagne. Tous ont admis s’y être pliés avec le « feu vert » de Bastien Millot et la conscience qu’ils entraient dans l’illégalité.
Tous, sauf lui, Bastien Millot. Et c’est parti pour trois heures de déroute à la barre. Il maintient ce qu’il a soutenu tout au long de l’instruction. Il n’a « jamais entendu parler d’un système de ventilation » et n’a « jamais vu aucune facture ». Il ne reconnaît donc « aucune » des infractions qui lui valent de comparaître devant le tribunal – parmi une dizaine d’autres prévenus – pour « complicité de faux et usage de faux », « complicité de financement illégal de campagne électorale », et « complicité d’escroquerie » dans l’affaire des comptes de campagne de Nicolas Sarkozy.
Zoom arrière. Début 2012, l’avenir sourit à Bastien Millot. Son groupe de conseil en communication et sa filiale Event & Cie sont déjà bien introduits auprès de l’UMP, dont ils assurent les principaux événements. Un choix qui doit tout aux liens d’amitié que Bastien Millot et le nouveau secrétaire général du parti, Jean-François Copé, entretiennent depuis des années. Le premier fut l’assistant parlementaire, le directeur de cabinet à la mairie de Meaux (Seine-et-Marne), le directeur de campagne aux élections régionales, et le conseiller ministériel du second. C’est aussi Bastien Millot qui a suggéré à Jean-François Copé le nom de son nouveau directeur de cabinet, Jérôme Lavrilleux.
La rancune de Sarkozy
La vie politique est décidément bien faite : en janvier 2012, l’ami Jérôme Lavrilleux cumule ses fonctions auprès de Jean-François Copé avec celle de directeur adjoint de la campagne de Nicolas Sarkozy. C’est donc tout naturellement qu’il choisit Bygmalion pour organiser les futurs meetings électoraux du président candidat.
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