Cette voix, bon sang. Si sobre, si posée. Si différente de celles qui se succèdent depuis trois heures à la barre de la cour d’assises, mardi 12 octobre.
« Je suis celui que le terroriste tenait en joue sur la scène. J’ai été sauvé in extremis par le commissaire de la BAC Nuit et son collègue. Sans eux, je ne serais probablement pas ici. »
Le 13 novembre 2015, Guillaume avait 21 ans. Il était étudiant.
« Lors des premiers coups de feu, j’étais situé sur la partie gauche de la fosse et j’ai vite compris qu’il s’agissait d’un attentat. Mon premier réflexe a été de me réfugier sous un amas de bois et de chaises et de cartons, qui était sur le côté. Il y avait plusieurs personnes qui avaient emprunté le même passage. Pendant les phases qui alternaient entre tirs et silence, je me déplaçais en direction de la scène en ayant pour but de rejoindre la sortie de secours. Lorsque les tirs ont cessé, après une très longue phase de tirs par à-coups, j’entends les deux terroristes qui étaient alors situés sur le balcon déclamer une phrase. Ils expliquaient pourquoi ils attaquaient, ils mentionnaient François Hollande, je ne saurais pas décrire précisément ce qu’ils disaient.
Je décide de profiter de la situation pour prendre la fuite. Sauf que j’entends des bruits de pas sur l’escalier en bois et je vois alors le troisième terroriste, qui se révélera être Samy Amimour. Il croise mon regard et il me fait signe avec son regard qu’il ne me tuera pas, ou du moins pas maintenant. Il a une démarche assez nonchalante. Il tient l’arme par la crosse et il semble la balancer, un peu comme un jouet. Bref, c’était assez marquant, cette façon de tenir son arme. J’attendais une posture un peu plus… professionnelle.
Il me regarde et il me dit :
“Toi, tu es avec nous. Allez, lève-toi.”
Du coup, je reste sur place. Et puis il commence à s’exciter un peu, il prend un ton un peu plus strict et il me dit :
“Lève-toi, sinon je te tire une balle dans la tête.”
Donc je me lève.
[silence]
« Je vois l’étendue des dégâts dans la fosse »
Et là, il me demande de venir avec lui sur la scène. Je me retrouve sur le rebord, les bras en l’air. C’est à ce moment-là que je vois l’étendue des dégâts dans la fosse, que je me rends compte de ce qui a été commis. Donc, je suis les mains en l’air tenu en joue par le terroriste. Et il me demande d’aller relever une vieille personne qui était accroupie dans la fosse et qui regardait dans notre direction.
“Aide ce fils de pute à se relever, on va regarder s’il est mort.”
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